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jeudi 2 février 2023

The man who wasn't there

J'ai posé un congé d'une journée. Rien d'exceptionnel. J'avais prévenu et remplit une demande en bonne et due forme. Par contre, j'ai oublié de décliner les réunions de la journée, dont un face-to-face.
Personne n'a remarqué mon absence. D'ailleurs, sur plusieurs compte-rendus j'étais noté parmi les "présent". Quant au face-to-face, mon interlocuteur s'est excusé de ne pas pouvoir y assister !

Dans le temps, c'était simple : vous deviez être présent, du lundi 8h au vendredi, à 17h. C'était manichéen : on était présent ou absent. Toute personne qui n'était pas physiquement à son bureau devait se justifier. Bien sûr, cela avait un côté pervers. C'était le temps du manager-pion, qui regardait par dessus votre épaule et des employés faisant semblant de travailler.
Avec les 35h, il y a eu "l'aménagement du temps de travail". Les gens qui s'absentaient un mercredi sur deux, les RTT, les horaires décalés... On passait d'horaires fixes à une obligation d'être présent physiquement dans l'entreprise pendant x heures par an.
 

Maintenant, on passe à une nouvelle étape : la déconstruction du temps de travail. Une transformation d'autant plus sournoise qu'elle fait l'objet d'aucune négociation nationale ; il n'y a que des lignes directrices et des garde-fous qui sont autant de vœux pieux.
Qu'est-ce que la présence, en 2023 ? Certaines entreprises autorisent 3, 4, voire 5 jours de télétravail. Vous croisez à peine vos collègues, au point où des "coffee" sous Teams remplacent la machine à café. Dans d'autres entreprises, il n'y a plus de bureaux dédiés par service. Les jours de présentiels, les employés s'installent où ils peuvent.
Surtout, les notions de "congés" ou "d'arrêts maladie" deviennent floues. Le covid a créé cette zone grise de "potentiellement contaminant pour ses collègues, mais en capacité de travailler". Grippe, angines, gastroentérites sont désormais synonymes de télétravail. En théorie, pour le télétravail, l’assurance ne vous couvre que si vous êtes chez vous. D'ailleurs, vous pouvez exiger de votre employeur à ce qu'il vous fournisse le matériel nécessaire (écran supplémentaire, casque audio...) à l’exécution de votre travail. En pratique, on tolère à ce qu'un employé soit où il veut, tant que le travail est fait. Lors des voyages avec quarantaine obligatoire, on autorisait le salarié à effectuer un télétravail durant la quarantaine et à ne prendre sur ses jours de congés qu'ensuite.
Au quotidien, vous avez souvent Outlook et Teams sur votre smartphone pro. Vous pouvez donc réagir rapidement, même hors des heures habituelles. Or, en entreprise, on glisse vite de "pouvez" à "devez"...

Le monde du tertiaire devient donc un monde virtuel. Dans les cas extrêmes, vous n'avez jamais vu vos collègues ou votre manager "irl". Les gens ne sont plus que des avatars avec des pastilles vertes, rouges, jaunes... Et plus rarement, blanches. Quel que soit le jour et l'heure, vous n'êtes jamais très loin de votre "bureau".
Ce monde-là ne donne pas beaucoup de droits aux salariés, mais pas beaucoup de devoirs non plus. Cela explique le fort turnover actuel. Néanmoins, ce n'est pas grave, on s'habitue à voir disparaitre des avatars et à en voir apparaitre de nouveau. L'entreprise devient un "lobby" de jeu en-ligne...

lundi 28 juin 2021

Motivation dans les chaussettes

Dans vos premiers boulots, vous êtes mo-ti-vé. La première expérience a été foireuse ? Pas grave, cette fois-ci, ça sera la bonne ! Si vous travaillez correctement, on va vous garder, non ? Vous allez terminer votre période d'essai, puis vous ferez carrière ici. Vous aurez des promotions, des augmentations et une belle médaille du travail pour service rendu.
Vous êtes intérimaire ou consultant ? Vous allez bientôt passer en interne ! Hier soir, votre patron vous a tenu la jambe jusqu'à 20h, mais au moins, vous avez bétonné vos chances de CDI ! Et puis, au pire, la boite de consulting a plein d'autres clients...

Avec le temps et au fil des échecs, la motivation chute. L'enthousiasme devient du cynisme. A chaque fois, vous êtes l'un des plus volontaires, l'un des plus productifs, vous atteignez vos résultats... En plus, vous demandez un salaire moindre ! Et pourtant, ça ne marche pas. Systématiquement, on vous vire. Alors vous en avez pris votre parti. Faire votre job du mieux que vous pouvez, jusqu'à votre dernier jour. Lorsque votre patron vous parle de l'an prochain, vous feignez de l'écouter : vous savez très bien que l'an prochain, vous ne serez plus là. Faire semblant, c'est le maître-mot. A la machine à café, vous faites semblant de vous intéresser aux dernières nouvelles du bébé de Ben (alors qu'il casse du sucre sur vous auprès de votre N+1.) Vous faites aussi semblant de vous intéresser à la vie de la société et vous vous rendez à tous les évènements corporate.

Au-delà d'un certain nombre de missions, la motivation tend vers le zéro. Ce n'est pas la tension, qu vous avez dans les chaussettes, c'est votre motivation ! Le cynisme est devenu de l'aquoibonisme. Dès votre premier jour, vous pensez à votre départ. Chaque jour en plus est une petite victoire. "Un mois que je suis ici et toujours pas d'entretien de discipline en vue !" Non pas que vous aimiez le chômage, mais vous vous savez maudit. A force de multiplier les expériences, vous en finissez par vous y perdre. "Salut, Thierry ! - Non, moi c'est Vincent." A quoi bon faire des heures supplémentaires ? A quoi bon s'appliquer à la tache ? Pendant les réunions de service, vous consultez Twitter. Vous faites le minimum syndical. Le café, vous le préférez seul. Et puis côté santé mentale... Il y a ceux qui s'enferment dans des salles de réunions pour pleurer discrètement. Ceux qui ne dorment pas la nuit. Plus rarement, il y a des gens ultra-agressifs, au bord de la confrontation. Puis, un jour, c'est l'entretien fatidique. Forcément, vu la qualité de votre travail, vous avez creusé vous-même votre tombe.

jeudi 13 mai 2021

Les différents styles de management

Durant ma longue carrière, j'ai vu évoluer le management. Voici trois styles de management que j'ai connu.
 

Le management viriliste
C'est le management à l'ancienne. Créer en permanence des conflits, avec un rapport de force. Avec les clients, comme avec ses employés. C'est l'exemple du speech d'Alec Baldwin dans Glengarry. Chez Valéo, vous étiez reçu dans un bureau sans fenêtre, à vous assoir sur une chaise très basse. Votre interlocuteur débarquait avec 30 minutes de retard et il cherchait à vous déstabiliser : "Comment ? Je ne comprends rien à ce que vous dites ! Vous parliez de x et maintenant, vous faites du y ?" Le N+1 parle et son équipe exécute, point. L'objectif, pour le N+1, c'était d'écarter les faibles. N'avoir que des winners, assoiffés de sang.

La fenêtre pour que cela fonctionne est très étroite. D'une part, le leader doit démontrer qu'au-delà des galons, il a du charisme et qu'il est vraiment le plus malin. Personne n'écoutera un minable.
Surtout, il y a l'exemplarité. A l'armée, le caporal gueule fort. Pour autant, il est là, avec les autres, à 6h et il sera le premier à effectuer le parcours. Enfin, lors d'une bataille, le caporal ne laissera tomber aucun de ses Hommes. C'est tout cela qui crée un lien de soumission. Les soldats se soumettent, car leur caporal est un despote éclairé.
J'ai eu le cas d'un chef tyrannique. Tous les matins, on en prenait pour notre grade. Qu'on ait bien fait son travail ou pas. Ce N+1 n'était qu'un yesman. Surtout, il était nul en technique (au point de ne pas comprendre le concept d'évolution d'indice.) Alors à quoi bon ?

Le manager-copain
C'est un style importé des start-ups de la Silicon Valley. On les retrouve beaucoup dans le tertiaire, notamment dans la prestation.

C'est généralement des managers-jeunes. Ils sont à peine plus vieux et mieux rémunérés que vous. Pas de tabous ; on peut tout se dire et les suggestions sont les bienvenues. On se tutoie, on s'appelle par son surnom, on va boire un coup après le boulot...

Souvent, c'est juste une façade. Il écoute vos idées, mais si le N+2 veut faire différemment, il n’argumentera pas. En cas de coup dur, vous n'êtes plus copains. C'est licenciement du jour au lendemain... Et parfois, c'est lui-même qui part du jour au lendemain.

Au pire, c'est un N+1 complètement toxique. S'il demande votre numéro perso, c'est pour mieux vous appeler le soir et le week-end. Il n'hésitera pas à vous culpabiliser : "Dis, on attendait ta présentation. Ton petit a 40° de fièvre ? N'empêche, quand il était couché, tu aurais pu travailler. On était tous très déçu que tu nous laisse en plan..."

Le management féminin
C'est l'antithèse du management viriliste. Un style basé sur la négociation et le compromis. Rien ne doit passer en force, tout doit faire preuve de consensus. Le conflit est un échec. Si une idée ne passe pas, le N+1 doit faire preuve de davantage de pédagogie.

Sauf que l'on ne vit pas dans le monde des Bisounours. Manager, c'est décider. Et chaque décision va forcément affecter négativement tout ou partie du service. En théorie, le management féminin offre un meilleur cadre de travail. En pratique, il y a des risques de conflits larvés, qui explosent violemment.

Or, le N+1 est souvent lui-même noté sur sa capacité à maintenir la paix. Quitte à organiser des usines à gaz pour que le râleur soit calmé. Au pire, on fait appel au N+2 pour qu'il tranche les litiges. A la longue, ce recours au N+2 devient systématique. Le N+1 finit par ne plus rien savoir de son service. Lors du premier confinement, ma N+1 a ainsi réalisé qu'elle n'avait pas les coordonnés personnels de ses employés, qu'elle ne savait pas qui avait des enfants, qui venait en transport en commun, etc.

Généralement, les N+2 optent pour des yesmen. Une personne qui n'ose pas affronter ses subordonnés n'osera jamais affronter ses supérieurs. Il se contentera de forwarder les mails, en cascade.

dimanche 9 mai 2021

Le travail sans machine à café !

Actuellement, lorsque le gouvernement parle du travail, c'est uniquement en termes économiques. Mais un travail, ce n'est pas qu'une tache à effectuer et un salaire le 31. Ça, les chômeurs le savent bien...

Avec la pandémie, la plupart des salariés du tertiaire sont chez eux. Cela fera bientôt 15 mois de télétravail. C'est du provisoire qui dure. Certains se sont même aménagés un bureau chez eux. Se lever, allumer son ordinateur et enchainer les réunions sous Zoom. Souvent, ces réunions sont expéditives. Pas de confidences ; on a toujours peur qu'une oreille indiscrète soit connectée... Les plus jeunes se contentent de la messagerie interne. Mais les plus vieux n'osent pas passer des coups de téléphones, juste pour parler de la pluie et du bon temps avec les collègues...

Parfois, il y a des journées de présentiel. On a l'impression d'être au mois d'août : la plupart des bureaux sont vides. Il y a certains collègues qui ne sont plus revenus depuis des mois. C'est à peine mieux que le télétravail. Au moins, vous pouvez faire une coupure nette entre vie privée et vie professionnelle. Mais ensuite, personne avec qui boire un café. Certaines entreprises ont fermé les réfectoires ; on mange à son poste. C'est une vie professionnelle sans ragots, sans pots de départ, sans after-work, sans animation du CE, sans déplacements professionnels, sans sourires... Sans vie, quoi.

mercredi 10 février 2021

Y'a quelqu'un ?

Pendant longtemps, le télétravail faisait figure de solution face au présentéisme. Avec le confinement, il fut généralisé. Les gens finir par se plaindre du manque d’interactions humaines et de l'isolement. Les mois passent et la crise du Covid semble s'éterniser. Le déconfinement complet en août ne semble être qu'un doux rêve. Les salariés se plaignent de plus en plus d'une santé mentale dégradée.

Mais il y a pire qu'être salarié en télétravail : être prestataire en télétravail.

Le Covid a d'emblée entrainé une crise économique. Les prestataires sont les premiers licenciés. Il suffit de négocier une rupture anticipée de contrat, avec un dédit. Les cabinets de prestation sont dans une telle mouise qu'ils acceptent volontiers les pénalités de rupture.
De plus, les entreprises ont levé le pied sur les projets : réorganisations, lancements de produits, audits internes, etc. Or, ce sont justement le genre de missions qui nécessitent de la prestation.
Parfois enfin, l'emploi ne peut être effectué à distance (notamment pour les postes opérationnels.) Conserver le prestataire n'aura aucun intérêt, en cas de reconfinement.

Ceux qui restent en place, ce n'est guère mieux. Le télétravail creuse le fossé entre les internes et les prestataires.
Dans certaines entreprises, les prestataires sont exclus des réunions de service. Et là, il n'y a même plus de "radio moquette". Dans certains secteurs stratégiques, les entreprises ne veulent pas laisser des externes manipuler à distance des données confidentielles. D'où un travail tronqué.
Enfin, comme les entreprises limitent les investissements (en capitaux, mais aussi en moyen techniques), la charge de travail a souvent sérieusement chuté. Le prestataire se retrouve donc chez lui, à ne rien faire, en se demandant jusqu'à quand son contrat va se poursuivre...

Les DRH ont souvent perçu la souffrance de leurs salariés. Des outils et des consignes sont données aux managers pour prendre le pouls de leurs équipes. Là encore, les prestataires sont hors du périmètre. Après tout, ils sont censés avoir un manager qui les suit !
En pratique, il y a énormément de turnover parmi les managers de cabinet de conseil. Après quelques mois, "votre" manager est parti. Son remplaçant sait à peine qui vous êtes. Il doit gérer des dizaines de consultants. 1) Il n'a pas le temps de faire des points hebdomadaires avec chacun d'entre eux. 2) Il se contrefiche de vous. Il est payé pour rentrer des affaires, pas pour faire du SAV.

D'où ce sentiment d'être sur une île déserte, oublié de tous...

lundi 21 décembre 2020

Création de poste... Ou presque


Dans les entreprises, les gens vont et viennent en permanence. Parfois, lorsque vous avez de la chance, il y a une période de passage de témoin. L'employé sortant a quelques jours -souvent, une semaine- pour vous expliquer les dossiers, les processus, etc. Qu'il parte volontairement ou pas, il est souvent aigri. 

Jusqu'ici, rien d'étonnant. Sauf qu'à la longue, vous réalisez qu'il a raison. Surtout, en consultant l'historique (par exemple : un vieux mail déterré sur un sujet qui traine), vous découvrez que ça a beaucoup bougé à votre poste. J'ai connu une boite où j'étais le quatrième en 18 mois !

La variante, c'est la soi-disant création de poste. Là encore, tôt ou tard, vous découvrez que quelques mois avant vous, il y avait quelqu'un d'autre là. A son départ, le responsable repris le processus de recrutement à zéro. Une fois, une même entreprise m'a contacté deux fois à 6 mois d’intervalle (un genre de "deuxième choix".)
Sur Linkedin, j'ai découvert qu'une boite où j'étais censé ouvrir un poste, avait déjà eu deux employés sur deux ans !

Il y a ainsi des postes avec un fort turnover. Généralement, en cause, un N+1 ou un des collègues, qui est épouvantable. Cela va du harcèlement (moral ou sexuel) à l'incompétence, qui en devient toxique. Dans les PME, le moindre poste vacant est problématique. Le dirigeant  devrait être particulièrement attentif à ce genre de difficultés. De même, dans les grandes entreprises, un manager doit être capable de surveiller des chefs d'unités.
Mais rien ne bouge. C'est le dogme du "pas de vagues". On préfère revoir des CV tous les 3 mois que de convoquer le fauteur de trouble. D'autant plus qu'il est souvent "connu"...

vendredi 13 novembre 2020

Dernier jour


J'ai fait allusion au premier jour en entreprise. Je n'avais pas parlé du dernier jour. J'en ai connu pas mal, des derniers jours en entreprise... Souvent, cela tombait en milieu de semaine. 

Pour tous vos collègues, c'est un jour comme un autre. Mais vous, c'est la dernière fois que vous venez ici.
Normalement, vous avez déjà confié vos dossiers à d'autres. Vous avez peu de mails ; peu de coups de téléphone. Vous êtes condamné à errer à la machine à café. Peut-être que vous devez assister à une réunion. Cela vous semble alors très abstrait, ces affaires en cours, ces actions à gérer. Peut-être qu'un gradé vous dira : "Vous pouvez traiter ceci ? - Euh... Non, je vais partir... - Quand ? - Ce soir. - Ah, au revoir." Avec le Covid, en plus, la moitié du service est absente. Notamment les collègues qui vous avaient promis un resto pour votre départ. Justement, les collègues sont bizarres. Souvent, ceux avec qui vous aviez sympathisé sont distants. Ils ont déjà tourné la page. D'autres se montrent étonnement proches. On vous a viré à cause de X et X, ils le connaissent bien : il en a déjà fait licencier plus d'un... Vous avez les angoissés du "tu as d'autres pistes ?" Ça y est, on vous réduit déjà à un chercheur d'emploi. Il faudra vous y habituer...
L'heure H approche. Finalement, la journée est passée plutôt vite. Ben quoi, vous n'avez pas le droit à un pot de départ ? Non, rien. Les pots de départ, les cadeaux, c'est pour les autres. Vous laissez un mot d'adieu, puis c'est le moment de laisser votre badge et votre ordinateur. Votre futur ex-chef vous invite pour un ultime mot. Vous auriez envie de lui dire que c'est une peau de vache, qu'il vous a bien eu, qu'en fait, personne ne l'aime. Mais rien ne sort de votre bouche ; vous être trop poli.
Et vous voilà dehors, comme d'habitude. Sauf que cette fois-ci, vous ne reviendrez pas demain. Vous n'êtes plus employé, vous êtes chômeur. Pour votre entreprise, c'est comme si vous n'aviez jamais été là. Un autre prendra votre bureau, votre téléphone et votre ordinateur. C'est fini.

jeudi 12 novembre 2020

Pas très protocolaire


La vie en entreprise, en ces temps de Covid, ça n'est pas terrible. Et j'y reviendrais. Mais il y a pire : vous pourriez être précaire !

Le Covid, c'est le genre d'instant où l'on a un besoin irrésistible de sécurité, que l'équipe soit plus soudée que jamais... Sauf qu'au contraire, les précaires sont livrés à eux-mêmes et leur mince filet de sécurité disparait.
Les entreprises profitent des confinements pour dégraisser discrètement. Il suffit de ne pas renouveler les contrats des prestataires et des intérimaires. C'est l'occasion de faire jouer le cas de "force majeure". Aux prestataires conservés, la mission est "temporairement suspendus". Dans les boites de prestation, on prolonge d'autant les périodes d'essai. Allez chercher de la motivation après 10 mois d'essai... Pour les personnes en portage, le chômage partiel n'existe pas : vous êtes au chômage tout court !

Une fois de retour, les clients peuvent considérer que les masques font parti du "délit de marchandage". Charge à vous de vous débrouiller pour en trouver... Et bien sûr, interdiction de venir sur le site démasqué. En mai, certaines entreprises ont mis des semaines à fournir des masques à leur consultants. J'ai ainsi vu des prestataires laver et relaver leurs masques chirurgicaux, au mépris de leur utilisation.
Le télétravail ? Ce coup-ci, l'état l'a juste "conseillé" aux entreprises. Charge aux représentants du personnel de pousser leurs poins... Et les prestataires ? En théorie, leurs boites sont là pour les défendre. En pratique, le marché est morose. Les entreprises sont bien contentes d'avoir encore des clients. Quant à se mettre en porte-à-faux pour défendre un prestataire... J'ai connu un chef de service qui considérait que le télétravail, c'était la fête du slip... Car lui-même aimait prendre la clef des champs durant ses jours de télétravail... Donc, il voulait que les prestataires restent 5 jours sur 5 au bureau. Tant pis pour la distanciation. Seuls les plus méritants ont droit à UN jour de télétravail.

En règle générale, tout le monde oublie que s'il y a des règles et des protocoles sanitaires, c'est parce qu'il y a un risque sanitaire. Et que donc, on met inutilement les prestataires présents en danger.

mardi 28 avril 2015

Money, money, money, must be funny... In a rich man's world

Le salaire, c'est le nerf de la guerre. Trop de patrons et de DRH sous-estiment son importance. Au quotidien, on sait bien que le moins cher est rarement le mieux. Un prix trop bas est même suspect. Mais les employeurs ont tendance à préférer le moins-disant.


De nombreux patrons de PME voient les employés comme des coûts et non comme des investissements. On entend rarement dire : "On veut un expert, quitte à mettre le prix." Mais plutôt : "Je suis sûr qu'on peut en trouver un meilleur qui demandera moins."
Lorsque le patron est le fondateur, la situation devient explosive. "J'ai sué sang et haut pour monter sa boite. Lui, il a juste déposé un CV. De quel droit ose-t-il demander une augmentation ?" Ca peut aller jusqu'au : "Qui est-il pour critiquer ma façon de payer les gens ? Il a monté la boite ? Je vais le virer sur-le-champ !"


Globalement, le "si t'es pas content, t'as qu'à aller voir ailleurs si c'est mieux" est la tendance. Consciemment ou inconsciemment, les entreprises privilégient les juniors. Mais à l'instar du gout pour les yesmen, cette politique est un poison sur la durée.
Car en face, les employés sont conscients du marché. Au "la porte est ouverte" répond le "au prix où je suis payé, je ne vais pas me décarcasser." Les plus hardis (donc les forces vives de l'entreprise) n'hésiteront pas à tenter l'aventure de la recherche d'emploi. Quitte à planter leur employeur du jour au lendemain. Les seuls qui restent, ce sont les ectoplasmes qui veulent pantoufler. A moyen terme, c'est donc une stratégie nuisible.

lundi 27 avril 2015

Conceptions du travail

Deux conceptions du travail s'affrontent. Chacune se veut dogmatique et porterait l'ultime clef pour résorber le chômage.

La vision plutôt à gauche, c'est que le travail est une contrainte. C'est un mal nécessaire de nos sociétés modernes : on travaille pour faire bouillir la marmite. Une contrainte subie, que l'on effectue sans joie. Du coup, la productivité est en berne : on en fait le minimum en attendant la cloche.
La solution, c'est de travailler moins. Plus de temps libre, donc plus d'épanouissement. Ainsi, d'une part, les salariés sont davantage motivés. Donc, ils travaillent mieux. En plus, si vous baissez la charge de travail de 1/5e, à charge égale, l'employeur sera obligé d'embaucher une 5e personne. Donc moins de chômage !
C'était l'idée des 35h. L'inconvénient, c'est que d'une part, l'impression de travailler moins s'estompe vite. Donc la productivité redescend. De plus, dans des nombreuses PME, voir des entreprises de plusieurs centaines de salariés, plus vous vous éloignez du cœur de métier, moins les services sont pourvus. Par exemple, dans l'industrie, les services production/fabrication sont bien pourvus. A contrario, il n'y a qu'une poignée de commerciaux et un seul comptable.  Dans ses services, il n'y aurait pas d'embauches liées à la réduction du temps de travail. Les employés devront y effectuer le même travail, mais en moins de temps. Si ce sont des cadres, on leur dira de se démerder et de faire des heures supplémentaires non-déclarées. Et paradoxalement, une mesure censée faire le bonheur des salariés devient une cause de burn-out.

L'autre vision, c'est la carotte. Les salariés veulent de l'argent, point. C'est ça qui les motive. Donc, ils sont prêt à travailler plus si on les paye davantage. Avec des heures supplémentaires (voir un travail le week-end), la productivité augmente. Donc on crée de la croissance et des emplois.
L'inconvénient, c'est que cela dépend de la macroéconomie. Si vous êtes dans un pays pauvre, que le magasin soit ouvert le dimanche ou pas ne change rien. Vous ne ferez pas davantage de courses. L'autre inconvénient, volontiers soulevé, c'est que les heures supplémentaires sont un moyen de pression. "Tu ne veux pas faire d'heures sup' ? Alors pars ! Je trouverai facilement quelqu'un prêt à travailler davantage."

Pour autant, j'ai rencontré davantage de personne qui préfèrent travailler plus (et être mieux payées) que d'avoir davantage de temps libre.

jeudi 1 janvier 2015

Réveillon(s)

Voilà, nous sommes désormais en 2015.

Pour un chômeur, toute fête est difficile. D'une part, parce que cela signifie des dépenses, alors que son budget est serré. De plus, ça lui rappelle que le temps passe. En regardant les images de réveillons dans les centres d'aides aux plus démunis, il se dit : "Peut-être qu'un jour, je serais là..." Bien sûr, comme à chaque réunion, on lui renvoi à la figure son statut de chômeur. Les autres ont des projets pour la nouvelle année. Lui, tout est suspendu à "trouver un travail".

A contrario, celui qui vient de retrouver un emploi est heureux. Il n'a plus honte d'affronter le regard des autres. Au contraire : il veut crier à la face du monde qu'il a un boulot ! Ca y est ! Il n'est plus dans les statistiques de chômeurs ! Certains vont jusqu'à commencer leurs phrases par "dans mon nouveau boulot..." Cela fait quelques jours qu'il travaille, mais il parle de sa boite et de ses collègues comme s'il était un vieux briscard. Et lorsque tout à l'heure, il a reçu un mail d'alerte concernant des offres d'emploi, ça lui a semblé loin... Qu'importe l'incertitude de passer la période d'essai/que son CDD soit prolongé, qu'importe aussi la longue attente de la première vraie fiche de paye. Ce qui compte, c'est de retrouver une place dans la société.

lundi 29 décembre 2014

Pok-pok-pok-poker face

On est en pleine saison des repas de noël et autres "fêtes de fin d'année". Ca devrait être un moment de fête et d'amitié. En pratique, c'est rarement un moment agréable. En fait, on est à la frontière entre vie privée et vie professionnelle. C'est censé être un repas différent des midis habituels à la cantine. La plupart des entreprises payent le resto, voir louent une salle. Parfois, il y a lieu le week-end ou en soirée ; donc hors des heures de bureau. Sans oublier les "arbres de noël" avec conjoints et enfants.

Mais malgré tout, vous êtes avec votre chef et vos collègues. Le responsable n'hésitera pas à se comporter en chef de famille. Pas question de boire comme un trou ou de commander du foie gras : ça sera noté sur votre bilan annuel ! Et bien sûr, le cas échéant, vous devez surveiller vos enfants... Souvent, la discussion tournera autour du travail. Surtout s'il y a plusieurs cadres dirigeants à table.
Le pire, c'est la fin de repas. S'il a lieu pendant les heures de bureau, pas de problème : le chef sonnera la cloche et chacun est prié de retourner à son poste. Sinon, vous êtes bons pour de longs silences ; personne n'a envie d'être le premier à partir. Parfois, l'alcool aidant, les vieilles rancœurs entre collègues font surface. J'ai vécu un repas qui s'est terminé par deux collègues qui en venaient au main. La société n'a plus fait de repas de noël ensuite.

mardi 23 septembre 2014

L'effet Tetris

La vie, surtout au travail, c'est comme le Tetris. Les succès disparaissent et les erreurs s'accumulent.

Lorsque vous êtes un "junior", tôt ou tard, vous avez un dossier "chaud". Le genre de trucs fastidieux dont personne n'a voulu s'occuper. Sauf qu'avec le temps, c'est devenu urgent. Alors, en tant que bleu, on vous refile la patate chaude. Vous, vous êtes motivé. C'est un beau challenge. Vous vous attelez à la tâche, pensant que votre période d'essai en dépend. Vous vous imaginez que comme dans les films américains, ça se finira par une présentation en public et que le big boss va vous applaudir...
Sauf qu'une fois le problème solutionné, il ne se passe rien. C'est l'effet Tetris : vous avez glissé une pièce et la ligne complète disparait. Votre N+1 va trouver que c'était une action normale, d'un employé normal. D'ailleurs, si vous étiez son chouchou, il vous mettrait sur des tâches simples (pour que vous enchainiez les succès.) Si c'était une question d'urgence, la personne en amont va considérer que désormais, vous êtes capable de tenir ce rythme de travail. Donc, vous allez voir débarquer d'autres "urgences apocalyptiques". Et bien sûr, si votre succès apporte une quelconque gloriole, votre N+1 va subrepticement remplacer son nom par le votre et se faire mousser avec auprès de la direction.

Et puis, il y a les coups fumants. Avec le temps, vous saurez détecter les situations pourries. Dans la précipitation, vous avez fait ou dit quelque chose qui n'allait pas. Ou bien, dans l'urgence, vous avez outrepassé votre niveau de responsabilité. Et au final, ça vous retombe dessus. Rien de très grave (sans quoi, ça serait le licenciement pour faute), mais "on" s'en souviendra. C'est l'autre effet Tetris : l'empilement d'erreurs. Si votre N+1 est remplacé, vous avez droit à une nouvelle partie. Mais si vous étiez en période d'essai ou en CDD, ça risque fort d'être irrémédiable.
Vos collègues, ils sont déjà en place depuis des années. A la limite, le N+1 s'est habitué à leur incompétence et aux tâches qu'ils ne savent pas accomplir. Mais vous, en tant que nouveau, rien ne vous est permis. Ne serait-ce que parce que le patron veut montrer aux autres qu'il peut être ferme.

jeudi 18 septembre 2014

Incitation à la triche, incitation à la paresse

Pole Emploi est assez binaire. Soit vous êtes au chômage, soit vous ne l'êtes pas. Et surtout, ce statut ne peut pas bouger au cours du mois. Or, dans le monde réel, il n'est pas rare de trouver un contrat (intérim, petit boulot...) pour quelques jours, voir quelques semaines. Sans oublier les CDD ou CDI qui commencent en fin de mois... Depuis peu, les rémunérations comme auto-entrepreneur sont également comptées comme "salaire".

Si vous êtes honnête, le mois suivant, vous allez dire que vous avez travaillé. Le paiement de vos indemnités est bloqué. Vous devez montrer des justificatifs de salaires (ou des factures d'auto-entrepreneur) et on vous en déduira le montant de vos indemnités. Bien sûr, tout cela prend du temps, avec une forte probabilité que suite à une erreur, vous soyez radié ou que vos indemnités soient réduites à 0. Or, c'est bien connu, le chômeur roule sur l'or ! Il peut se permettre d'attendre des semaines, voir des mois, qu'il soit payé ! Essayez de dire à votre propriétaire : "Désolé, je n'ai pas encore reçu le chômage. Je te paye le mois prochain, ok ?"
La seule solution, c'est de tricher. Dans le temps, c'était simple : si vous travailliez hors de votre département de résidence, vous quittiez les écrans de radar. Aujourd'hui, je vous conseille de régulariser a posteriori. Vous jurez que "non, je n'ai pas travaillé", vous touchez vos indemnités et une fois pincé, vous remboursez le trop-perçu. Evidemment, cela implique de vous rendre à Pole Emploi, de faire au moins un courrier, puis d'y retourner parce qu'on vous a radié "par erreur".
Dans un monde idéal, les déclarations mensuelles ressembleraient à des feuilles d'intérim. Sous chaque jour, vous précisez si vous avez travaillé, si vous étiez en congé, etc. Le système actuel est plutôt une incitation à la paresse. Le chômeur veut reprendre un travail. Trouver un CDI ou un long CDD est une gageure. Parfois, le simple fait de travailler quelques jours permet de reprendre confiance et de remettre le pied à l'étrier. Surtout pour un chômeur de longue durée. Mais au lieu d'encourager cela, Pole Emploi sort le bâton. Ne reprenez pas le travail, sinon, on vous coupe les vivres ! A quoi bon travaillez un jour pour devoir ensuite s'en justifier trois jours ? Autant inciter les gens à rester chez eux...

mardi 16 septembre 2014

La phobie de la réunion

"Chat échaudé craint l'eau tiède." On devrait dire : " Ancien chômeur craint les réunions. " Plus précisément, les réunions impromptues, seul face à son N+1, voir son N+2. Les réunions du vendredi soir, sur lesquels le responsable ne diffuse pas d'ordre du jour préalable.

Un licenciement, ça laisse des traces. Quand quelqu'un perd son emploi, la seule priorité, c'est qu'il en retrouve un autre. On ne cherche pas à "reconstruire" le chômeur. Tout le monde pense qu'une fois en poste, tout sera oublié; une nouvelle vie commence. Or, il va rester marqué par son licenciement.
La personne a travaillé des mois, voir des années pour l'entreprise X. Il se pensait bon employé ou à défaut, pas pire que les autres. Puis un soir, on l'a convoqué. La personne s'attendait à un banal point. Son responsable lui a demandé de fermer la porte derrière lui. Les mots tombent généralement brutalement, tel un couperet. Le N+1 dit que ça ne peut plus durer ; le salarié est licencié. La décision est sans appel. La lettre recommandée suivra.
Le N+1 jubile. Cela faisait des semaines, voir des mois qu'il fomentait ce licenciement. C'est un poids en moins. Il s'est bien caché, car il voulait éviter tout risque de terre brûlée. Il a déjà préparé "l'après".
L'employé, lui, voit son monde s'écrouler. Pourquoi lui ? Pourquoi maintenant ? Que va-t-il devenir ?

Des semaines, des mois plus tard, il rebondit enfin. Un nouvel emploi, chez Y. Reste les séquelles. La confiance est rompue. L'ex-chômeur sait qu'on peut décider de le licencier d'un seul coup. Ça s'est produit une fois et ça peut recommencer. Il guète le moindre geste, la moindre conversation. L'annonce d'une réunion seul à seul est une vraie torture.
Pourtant, en tant que cadre, il doit régulièrement rendre des comptes à son supérieur. Et ses collègues n'ont pas toujours besoin d'être là.

vendredi 29 août 2014

Vacances forcées

Au mois d'août, il n'y a pas grand chose à faire. Certaines PME ferment. Parfois, ce n'est pas toute l'entreprise, mais juste un service, qui ferme. Pour les responsables, c'est logique : il n'y a aucun intérêt à rester ouvert. Il n'y a pas d'activité et une entreprise ne paye pas ses employés à bailler aux corneilles !

Mais pour l'employé, la logique est différente. Si vous n'avez pas d'enfants en age d'être scolarisé, pourquoi vous embêter à partir en août ? C'est plus cher, il y a plus de monde et souvent, moins de choix. Quant aux personnes ayant récemment repris une activité, elles n'ont tout simplement pas le budget pour.
Le problème, c'est que la loi est du côté des responsables. Si l'entreprise ferme, vous devez prendre des vacances. Si votre chef décide de fermer le service, vous devez prendre des vacances. Et si vous avez pris tous vos congés (ou que vous n'en avez pas assez) ?
Là, en théorie, l'employeur doit vous offrir des congés payés supplémentaires. En pratique, il peut vous forcer à prendre des congés sans soldes. Il vous force à partir en vacances et en plus, il ne vous paye pas ! En général, c'est ce genre d'employeurs qui sont victimes de démissions impromptues...

lundi 18 août 2014

Août...

Quand on vient de reprendre le travail, le mois d'août est à la fois la pire et la meilleure chose. La meilleure, parce que vous n'avez rien à faire. La pire, parce que vous n'avez rien à faire.

Pas de réunion de service. Vous devez envoyer un mail ? Vous recevrez très probablement un message qui dire : "Monsieur Untel est en congé jusqu'à..." Et lorsqu'enfin, il revient, la personne à qui vous deviez une information est elle-même partie en congé ! Dans les grandes entreprises, il y a de nombreux "triangles des Bermudes" où vous pouvez glander en attendant le soir (machine à café, salles de réunion...) A contrario, dans les PME, vous êtes davantage fliqué. Donc forcé de faire semblant de travailler. La notion d'acte de présence prend tout son sens...

Dites vous qu'au moins, par rapport au chômage, vous êtes payé pour être là.

lundi 11 août 2014

L'autre job d'été...

Quand on pense jobs d'été, on pense aux petits boulots.
Mais il y a parfois de "vrais" jobs, souvent dans l'intérim. Août, c'est un mois où la France tourne au ralenti. Beaucoup d'entreprises ferment. Les DRH sont en vacances. Cabinets de consultant et agences d'intérim baissent le rideau de fer. Sur les sites d'emploi, il n'y a plus rien de neuf depuis le 31 juillet...

Dans ce contexte, le moindre imprévu devient disproportionné. Un poste à pourvoir en aout, c'est comme une rage de dent un dimanche, à 2 heures du matin. Un salarié qui tombe malade, un nouvel arrivant qui fait faux-bond, un surcroit d'activité imprévu... Les RH paniquent. Il faut d'abord trouver un moyen de recruter. L'unique employé d'astreinte de l'agence ou du cabinet doit faire le tour des CV sur son bureau. Manque de pot, beaucoup de portables sonnent dans le vide. Puis, miracle, il trouve une poignée de candidats. Pas de salamalecs : c'est entretien l'après-midi même, rendez-vous demain chez le client et prise de décision le surlendemain. Là, en général, le chômeur est encore en pyjama. Dans une scène digne d'Orange mécanique, il doit se laver, mettre un costume, se rendre au rendez-vous, etc. en un temps record. Et comme d'habitude, il n'a aucune info sur le poste à pourvoir.
Pour le chômeur, c'est tout bénef. Tout le monde est pressé, donc ils ont moins la tête à négocier un salaire et ils sont moins regardant sur le CV. Par contre, ils sont nerveux, stressés, voir agressifs. Certains ne perdent pas complètement le nord. Si vous foirez l'entretien, le recruteur peut vous prendre à parti (y compris physiquement.) Et bien sûr, il faut être disponible IMMEDIATEMENT. Impossible de décaler l'heure des entretiens.

Éventuellement, ils proposeront une mission plus intéressante (et mieux payée) que d'habitude. On l'a dit et redit, la disponibilité, c'est le critère N°1. Si ça marche, tant mieux. 48h après le premier coup de fil, le contrat est signé. Le chômeur est en poste ! Il est d'autant plus heureux que c'était inespéré et qu'il n'a même pas eu le temps d'attendre.
Par contre, si ça ne marche pas, les cabinets de recrutement l'oublient de sitôt. Au moins, la réponse tombe dans les heures qui suivent. Les agences d'intérim, davantage habituée à avoir des offres en août, garderont son CV en haut de la pile (parce que lui, au moins, il est disponible.) Et peut-être qu'ils auront quelque chose à proposer dans les jours suivants...

mardi 5 août 2014

Job d'été

L'été, c'est par définition la saison des petits boulots. Bien sur, on ne va pas vous confier un poste à responsabilité (on y reviendra...) Les avantages sont nombreux pour le chômeur. Le plus évident, c'est que cela permet de gagner un peu d'argent et de repousser l'échéance de la "fin de droit".

Evidemment, les jobs qui recrutent largement, sans qualifications, n'ont pas des horaires terribles. Mais certains emploi en horaires décalés offrent des primes intéressantes. Quant au secteur de l'événementiel, il offre des avantages en nature (repas, goodies et le cas échéant, hébergement.) Surtout, ces jobs offrent de la resociabilisation. Pendant quelques jours, vous n'êtes plus un chômeur; un rebut de la société. Vous redevenez un salarié, avec des collègues, des horaires de travail et une mission. Il fait beau, un de vos collègues n'arrête pas de raconter des blagues... Psychologiquement, c'est un sacré changement par rapport à d'habitude.
Le problème ? On l'a déjà dit, il faut se battre pour avoir un petit job. Même là, il y a des entretiens. Parfois, vos compétences techniques, commerciales ou vos connaissances des langues étrangères peuvent être un atout. Reste que vous n'avez pas eu un bac+5 avec mention pour distribuer des prospectus sur un salon, faire voiturier ou assurer l'accueil d'un parc d'attraction... Vous avez beau essayer d'être humble et modeste, vous gardez de la distance. A fortiori quand un gros beauf se montre condescendant à votre égard. A la longue, ça vous fait chier de vous lever à 7h du matin pour ça. Et puis, ne vous faites pas d'illusion. Ce n'est pas parce que vous travaillez dans un magasin de [multinationale], que [multinationale] va vous proposer un emploi de cadre. Non, souvent, vous travaillez en fait pour un sous-traitant (qui parfois est lui-même sous-traitant) donc vous aurez peu de liens avec les "vrais" employés. D'autant plus que les responsables sont rarement physiquement présents.
Dans le meilleur des cas, votre mission débordera sur septembre (encore un peu d'argent de poche...) Dans le pire des cas, vous pouvez compter les jours à sourire à des cons (les gens sont très cons lorsqu'ils sont en vacances) jusqu'à la quille...

mardi 1 juillet 2014

Usine à gaz


Beaucoup d'entreprises ont des conflits ouverts entre employés. Pour beaucoup de chefs de service, la solution s'appelle "l'éléphant dans le salon" : c'est une gène terrible, mais tout le monde fait comme s'il n'existait pas. Il faut à tout pris éviter la confrontation. Cela donne des situations ubuesques : un employé qui refuse d'effectuer telle tache (pourtant dans son périmètre), deux employés qui ne veulent pas travailler ensemble (alors que leurs périmètres se touchent), une directive non-appliquée (notamment parce qu'elle froisse les syndicats), etc. Au fil du temps, tout le monde s'habitue à faire des détours. Ca devient normal.

Le nouveau-venu tombe souvent des nues face à la situation. Au mieux, son responsable monte une usine à gaz : il faut faire telle tâche, à la place de X, mais sans que X voit qu'on l'effectue dans son dos. Souvent, on ne met pas le novice au courant des non-dits (ne serait-ce que parce qu'ils semblent désormais "naturels".) Il va inconsciemment aborder le sujet qui fâche. Les plus jeunes -et les plus idéalistes- s'attaqueront aux problèmes avec la fleur au fusil. Ils sont persuadés d'agir pour le bien de l'entreprise.
Dans le pire des cas, on l’envoi carrément au casse-pipe : par exemple, mettre en place une directive controversée. Il vient d'arriver, donc il peut repartir aussi sec. Et comme on dit, premier arrivé, premier servi ; le bleu fera le sale boulot. En cas de souci, la hiérarchie dira qu'il a agi de son propre chef. La paix sociale mérite bien qu'on sacrifie un "bleu".

En général, c'est le genre de boulot où vous ne passez pas la période d'essai. De toutes façons, en général, vous vous rendez compte qu'il n'y a pas qu'un seul problème. Comme il n'ose pas trancher, le responsable laisse s'accumuler plein de problèmes. Vous voilà dans une entreprise pleine d'usines à gaz et de décisions que personne n'ose prendre. Pas vraiment le genre d'entreprises où l'on peut s'épanouir.