jeudi 6 février 2014

Le téléphone (1)

S'il fallait résumer le chômage en un verbe, ce serait "attendre". Attendre le coup de fil ou le mail providentiel. Celui qui dit : "On veut vous voir". Voir carrément : " On a décidé de vous prendre."

Aujourd'hui, grâce au portable, on n'est jamais loin de son téléphone ou de sa boite mail. Mais avant, c'était le temps des journées à fixer le téléphone. Ca devenait une obsession. Attendre que ce fichu téléphone ne sonne. Inconsciemment, on restait au garde-à-vous, prêt à bondir sur le combiné. Lorsqu'on vient de passer un entretien ou qu'on a envoyé une candidature pour un job de rêve, l'intensité augmentait. S'éloigner, ne serait-ce que pour un besoin naturel, était une torture. "Et si on m'appelait à ce moment-là ?" A croire qu'un recruteur allait se dire : " Alain n'est pas là ? Tant pis, je vais prendre Nicolas à la place. "

Même aujourd'hui, le pire, c'est lorsqu'un recruteur vous dit : " On prendra une décision tel jour. " Le jour J, pas d'appel. Vous vous dites : " C'est foutu. " Piteusement, vous appelez le lendemain : " Excusez-moi de vous demander pardon. Mais je voudrais savoir si, par hasard, vous avez pris une décision... " Là, c'est généralement un moment de désinvolture : " Ah oui, c'est vrai, on a oublié de vous dire... En fait, on a décidé de prendre quelqu'un d'autre." ou " En fait, on n'a pas encore tranché. On verra ça lundi prochain. Ou mardi. " C'est comme ça, on vous avait convoqué à un entretien le jour même. Vous avez du courir pour imprimer des CV et traverser toute l'Ile-de-France. Par contre, pour vous répondre, monsieur prend son temps ! Vous êtes bon pour de nouvelles journées à attendre que le téléphone sonne. Au moins, vous avez encore un espoir d'être pris. Et c'est déjà ça.

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