Aujourd'hui, les CDI se raréfient. On préfère faire signer d'interminables "contrats de chantier", contrats d'intérim, voir carrément, des conventions de stages. Le premier intérêt, c'est que ces catégories n'apparaissent pas dans les charges de personnels. Du pain-béni pour une PME forcée de dépasser le seuil fatidique des 50 employés. On peut les licencier quasiment du jour au lendemain. Enfin, en mettant la pression sur un tiers (le cabinet de consultant et l'agence d'intérim), on peut revoir les salaires à la baisse.
Mettre la pression, c'est le leitmotiv du patron. Il faut instituer un rapport de force favorable. Autant il n'ose pas réprimander ses salariés en CDI, autant ses précaires doivent se sentir en permanence sur une corde raide. L'idée est qu'ils doivent donner leur maximum, en vue d'un hypothétique CDI. Et pendant des mois. Lorsqu'ils seront en bout de course, on les remplace par des salariés neufs. Dans un pays où il y a plus de 3 millions de chômeurs, le réservoir de chair fraiche semble inépuisable.
Les free-lance connaissent bien cette pression. C'est le "faites nous un beau dessin, on vous payera pas, mais ça vous fera une belle référence" des dessinateurs. Ou le "créez-nous un site web, s'il nous convient, on le payera" des informaticiens. Le donneur d'ordre se prend pour un roi de la négociation !
Effectivement, les juniors se donnent à fond. Ils croient durs comme fer à ce CDI. Et avec un salaire à la hausse (car on leur demande de "faire un effort", le temps du contrat ou de la période d'essai.) Dans les grandes entreprises, le fait de pouvoir mettre un nom prestigieux sur son CV est une belle motivation.
Et dans les autres cas ? Le salarié se démotive rapidement. Les cadres ont fait de longues études où on leur a répété qu'ils sont la crème de la crème. Travailler avec un contrat précaire, pour un salaire de misère, c'est une insulte ! Ils comprennent vite qu'à la fin du contrat précaire, il n'y a qu'un autre contrat précaire (dans la limite légale des possibilités de renouvellement.) Quant aux augmentations... Un employeur m'a demandé de "faire un effort" durant ma période d'essai. Puis de "maintenir cet effort", le temps de définir des objectifs à atteindre. Une fois les objectifs définis, on m'a dit d'attendre qu'ils soient atteints. Et une fois les objectifs atteints, j'ai réclamé mon du... Et j'ai été licencié.
Dans ces conditions, le salarié précaire reste en "recherche active" d'emploi. Les plus hardis partent du jour au lendemain, dés qu'ils trouvent mieux. J'ai vu des salariés quitter un travail après un ou deux jours, voir carrément de planter un ex-futur employeur. Les plus mollassons ou les moins chanceux restent en poste, mais à reculons. Absentéisme, squattage de machine à café (pour les plus vieux), twittage compulsif (pour les plus jeunes)... C'est le règne de l'aquoibonisme et l'acte de présence.
Un bon salaire et un bon statut ne garantissent pas une productivité optimum. En revanche, si vous considérez vos salariés comme une main d’œuvre jetable, vous êtes sur d'avoir une productivité minimale en retour.
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