mardi 3 juin 2014

Démotivation


Depuis le début de ce blog, je n'ai encore jamais évoqué les lettres de motivation. On dit toujours : "Envoyez CV et lettre de motivation à..." Pour moi, c'est un archaïsme hérité de l'époque où on postulait en envoyant de vraies lettres. C'était aussi l'époque où les grandes entreprises publiaient directement leurs annonces et où le descriptif du poste était conséquent.

Aujourd'hui, ça n'a aucun intérêt. Les annonces sont extrêmement sibyllines et extrêmement vagues. Il n'est plus possible de dire "ce qui m'intéresse dans l'entreprise, c'est..." ou "je correspond au poste, car..." De plus, tout se fait par mail. Au mieux, votre lettre de motivation est dans le corps du mail. Au pire, c'est juste un fichier attaché. Certains sites de recherche d'emploi vous proposent d'enregistrer une lettre-type.

Au final, le cabinet de recrutement reçoit une lettre complètement impersonnelle. C'est le fameux "je-moi-nous" avec le typique "suite à l'annonce du tant, je postule au..." et l'inévitable "dans l'attente de votre réponse, veuillez agréer mes salutations distinguées." Vu que beaucoup lisent les CV en diagonale, je doute qu'ils lisent ces lettres... Le seul intérêt éventuel, c'est de mesurer la syntaxe et l'orthographe du candidat. A part, comme d'habitude, dans les PME, généralement moins sollicitées et où les recruteurs peuvent davantage lire les lettres.

lundi 2 juin 2014

Fils de...


J'ai toujours du respect pour les gens qui ont créé leur entreprise. Même s'ils avaient d'emblée beaucoup de moyens ou que leur entreprise ne marche pas. Parce qu'il faut du courage et de l'abnégation pour se mettre à son compte.
A contrario, je suis très méfiant à l'égard des enfants, gendres ou cousins du fondateur. Certains sont compétents. Rien qu'en France, il existe nombre d'entreprises gérées par de véritables dynasties (Michelin, PSA, Bolloré, Dassault, Lagardère, Ricard S.A...) Certains patrons imposent d'ailleurs un parcours "à la dur" à leur progéniture, afin qu'ils fassent leurs preuves. Mais souvent, les "enfants de" se comportent en terrain conquis et faute de parcours hors du cocon familial, ils n'ont aucun recul. Dans plusieurs cas, le patron finit par se raviser et à vendre son entreprise à d'autres.
Pour quelqu'un, donner des responsabilités à ses enfants, c'est transmettre en héritage. Il y a l'idée que son entreprise soit une "famille" (une notion fréquente chez les vieilles PME.) C'est aussi vouloir jouer les grands seigneurs et montrer que l'on a les moyens d'offrir un poste d'un claquement de doigts. D'autres le font en se disant que leur progéniture seront leur prolongement : ils appliqueront leurs idées, voir fliqueront davantage les autres employés (réduisant les angles morts.)

Dans une entreprise, j'ai travaillé pour une caricature du "fils de". Un jeune homme sans aucun diplôme, dont le seul mérite était d'être le fils du patron. Cet homme né avec une cuillère en argent dans la bouche faisait de grands discours sur le travail acharné, le mérite, le dévouement, etc. Il va sans dire qu'il arrivait tout les matins à 10h, jamais rasé, habillé comme l'as de pique et qu'il avait 12 ans d'âge mental. Il changeait d'avis comme de chemise, disparaissait sans raison (et sans prévenir) et parlait comme un charretier aux clients. Un matin, j'avais un dossier à le faire signer. Je l'ai trouvé, les pieds sur son bureau, lisant un magazine de surf et me déclarant avec le plus grand sérieux du monde : "Il faudrait qu'on achète un laser." (NDLA : bien sûr, ça n'avait aucune utilité pour la société.) A cet instant-là, j'ai compris que je devais partir. Et vite.
Plus tard, j'ai connu un scénario digne de Dallas ! Le fondateur avait deux fils. Pour une raison inconnue, il a légué l'entreprise au cadet. L'ainé ne l'a pas supporté. Autant dire que c'était la guerre permanente entre les deux hommes. L'un disait blanc et l'autre disait noir. Une situation intenable pour les employés. D'autant plus qu'aucun des deux n'avaient vraiment de stratégie.
Dans une troisième expérience, le patron avait carrément embauché sa femme, ses deux filles et le mari de l'ainée ! Le gendre était particulièrement incompétent. Heureusement, ses responsabilités étaient très limités. Bien sûr, ils avaient tous une voiture de fonction, un défraiement généreux et des horaires à la carte. Alors qu'on nous expliquait que l'heure, c'est l'heure et que faute d'argent, il ne fallait pas compter sur une augmentation. Y compris pour l'année d'après. Et celle d'après. Comme le gosse du premier cas, le gendre était un spécialiste du don permanent de leçons, notamment sur la bonne gestion du salaire. L'entreprise lui payait -presque tout- à lui et à sa femme, c'est sur qu'ensuite, ils pouvaient épargner !

mardi 27 mai 2014

The Net

Tous les conseillers vous le disent : vous devez vous créer un réseau. C'est le seul moyen d'atteindre ce fameux "marché caché de l'emploi".

L'un des moyens, c'est bien sûr les réseaux professionnels (Viadeo, Linkedin...) Vous vous inscrivez, vous remplissez votre fiche, vous vous mettez "ami" avec d'anciens collègues et camarades de classe, vous vous inscrivez à des groupes proche de vos sensibilités... Quelqu'un passe sur votre page ? Vous lui faites une demande d'amitié !
Vous vous imaginez déjà décrochant un travail, grâce à votre réseau. Qu'un ex-collègue vous dise : "Eh, l'entreprise X recrute !" Et en prime, grâce à lui, votre CV est en haut de la pile !
Et en vrai, comment ça se passe ? Vous vous rendez vite compte que 2 catégories pullulent sur les réseaux : 1) les gens qui, comme vous, cherchent du travail. 2) les gens qui ont quelque chose à vendre. Sans oublier les accros qui modifient leur CV et leur photo de profil tous les jours (qui feront autant de notifications sur votre compte.) Qui plus est, vous êtes vite limité. Ces réseaux ne sont pas des organisations philanthropique ; elles vous font payer des prestations. En général, vous avez droit à n contact et x mails gratuits; au-delà, c'est payant. En résumé, ce ne sont pas des endroits pour trouver un emploi. Il faut les voir comme un outil supplémentaire, à l'instar du dépôt de CV sur les sites de recherche d'emploi. L'autre intérêt, c'est de confirmer un CV-mytho. Parfois, lors du processus de recrutement, le stagiaire du recruteur fera une "vérification". C'est à dire taper votre nom sur Google. Si votre profil sur les réseau est d'équerre avec votre CV, le stagiaire considérera que sa mission est finie. Et bien sur, comme votre profil risque d'être visionné par des inconnus, évitez les photos compromettantes...

mardi 20 mai 2014

Petit boulot



Les juniors ont beaucoupde mal à mettre le pied à l’étrier. Certains réussissent à décrocher d’emblée un CDI. Mais dans de nombreux cas, c’est plutôt un enchainement de CDD, de missions d’intérim et de période de chômage. Dans quelle proportion ? Les zappés ne se vantent pas de l’être et les chiffres manquent. Plus le chômage s’éternise et plus il faut « étendre sa recherche ». Lorsqu’il n’y a vraiment plus rien en vue et/ou que l’argent manque, il reste les petits boulots.
Les petits boulots recoupent de nombreuses situations. On y trouve des jobs saisonniers, voir journaliers, de l’intérim et parfois des CDI.


  • Souvent, les chefs d’équipes craignent les candidats surdiplômés. Ils craignent –légitimement- un manque d’implication et qu’à la première occasion, il s’en aille. Vous devez donc envoyer un CV « allégé ». Parfois, l’entretien est très informel : on vous jugera davantage lors de la journée d’essai.

  • Par définition, s’ils recrutent très largement, c’est qu’il y a un loup. Soit ce sont des jobs mal payés, soit durs physiquement, soit dans un environnement difficile. Les jobs nocturnes proposent parfois des taux horaires élevés et un temps de travail réduit. Mais tout le monde n’a pas forcément l’envie ou la possibilité de travailler la nuit.

  • Ce sont souvent des jobs kleenex. Ici plus qu’ailleurs, les responsables reçoivent presque tous les jours des candidats. Vous n’êtes pas content des conditions de travail ? La porte est ouverte ; il y en a 10 prêts à faire ton job !

  • Certains secteurs, comme l’immobilier, recrutent en permanence. A contrario, les jobs estivaux sont très recherchés (notamment par les étudiants en quête d’argent de poche.) Il faut donc vous réveiller bien en avance… Quoi qu’il en soit, ne croyez pas qu’on n’attendait que vous. Il faudra vous battre pour décrocher ce travail !

  • Ne faites pas votre Florence Aubenas ! Ce n’est pas parce que vous avez bac+4 et que vos collègues ont bac-5 que vous devez être condescendant. Vous n’êtes pas forcément le plus doué pour ce poste. D'ailleurs, il y a peut-être d'autres bac+4 parmi vos collègues...

A court terme, c’est une toujours bonne leçon d’humilité. Ça vous permettra de prendre du recul par rapport à votre poste et au monde du travail. Mais le retour peut être difficile : ce passage par la case « petit boulot » peut effrayer un recruteur.

lundi 19 mai 2014

Comment préparer un entretien ?

Pour sortir du chômage, il faut obligatoirement passer par la case "entretien". J'ai évoqué les entretiens foireux ici, ici et ici. Et comment réussir un entretien ? Le problème, c'est qu'il n'y a pas d'entretien parfait. C'est la grande frustration du chômeur : on lui reproche d'être tour à tour trop vieux, trop jeune, trop effacé, de faire du rentre-dedans, d'être sous-qualifié, d'être sur-qualifié, d'être pas assez volontaire, d'en faire trop, etc. Chaque recruteur a "son" profil-idéal. Tout dépend de sa propre personnalité, son parcours, son âge...

Préparer avant tout un entretien, c'est avant tout des questions de bon sens. Bien sur, il faut venir en costard et avec une chemise repassée (et en tailleur pour les femmes.) Le jogging ou le jean troué sont à proscrire ! Il faut penser à aller aux toilettes avant et à bien boire de l'eau (pour éviter de ravaler sa salive au cours de l'entretien.)
Si possible, il faut se renseigner sur l'entreprise et le job proposé. L'idéal, c'est de montrer sa motivation pour travailler dans l'entreprise ou les compétences que l'on a et qui serait en adéquation avec le job. Sauf que désormais, par peur des fuites, les annonces sont très vagues. Parfois, le recruteur lui-même n'a que peu d'infos et ce n'est qu'au deuxième entretien que vous en savez plus.

LE conseil, c'est de préparer ce que l'on doit dire. En théorie, un entretien n'est qu'une conversation pour confirmer les dires de votre CV. En pratique, c'est un examen oral. Et comme tout examen, il faut réviser.
  • Le parcours. En général, au début d'un entretien, on vous demande de vous présenter. Ce qui est éliminatoire, c'est de dire d'un ton monocorde "j'ai travaillé chez x de telle date à telle date, puis chez y de telle date à telle date". Il faut être vivant et souligner vos résultats : "J'ai travaillé chez x de telle date à telle date, j'ai doublé leur chiffre d'affaires à l'export et j'ai ouvert tel pays. Ensuite, chez y, j'avais 10 personnes sous ma responsabilité et on a explosé les objectifs." Il faut montrer que ça vous a plu et que le recruteur aient envie de vous écouter jusqu'au bout. - Il faut vous entrainer à éviter les "donc", les "malgré que", les métaphores hasardeuses...
  • Les questions pièges. Certains recruteurs cherchent l'angle-mort (souvent, à la fin de l'entretien.) Trou de plusieurs mois dans le CV, hobby curieux... Les plus agressifs peuvent vous poser des questions très intimes (pourquoi est-ce que vous êtes célibataire à 30 ans ? Pourquoi est-ce que vous avez arrêté tôt vos études ?), sans oublier le classique : "quels sont vos 3 défauts et vos 3 qualités ?" A chaque fois, il faut se préparer avec des réponses toutes prêtes. Il n'y a pas de place pour la spontanéité. 
  • Plus généralement, la subtilité, c'est de se préparer sans pour autant donner l'impression d'un speech tout-prêt. Oubliez le style "sportif en conférence de presse". Regardez les acteurs : ils apprennent un texte et pourtant, une fois à l'écran, ils n'ont pas l'air de réciter. Les meilleurs font même semblant d'improviser. A vous d'en faire autant en entretien !

mardi 13 mai 2014

Génération desenchantée

La prochaine génération fera d’exécrables employés de bureau. Ils sont désabusés. Ils se disent (avec raison) qu'ils vont travailler longtemps, pour des salaires misérables, avec des contrats précaires, sans aucune possibilité d'évolution et de fréquentes périodes de chômage. En bref, les zappés ne seront plus l'exception, mais la règle.
Ils sont d'autant plus amères que pour eux, cette situation est le résultat de l'incompétence de leurs ainés. Et d'une politique -notamment sur les retraites- de glissement des problèmes sous le tapis.

Les jeunes sortant des écoles n'attendent pas grand chose du salariat et du secteur privé. Certains espèrent une fortune rapide et (presque) sans effort, sur les traces de Loana, Nabilla et les autres stars de la télé-réalité.
D'autres, sur le modèle des hipsters US, sont davantage dans l'aquoibonisme. Il y a tout un discours sur l'importance du moment présent et l'épanouissement personnel. Mieux vaut faire ce que l'on aime, quitte à vivoter, plutôt que de s'accrocher à une "carrière" illusoire.
Qui plus est, ils n'ont pas vraiment de notions d'autorité. Les parents sont des copains et les profs, des animateurs. Quoi qu'il en soit, il est clair que les employeurs auront du mal à motiver leurs jeunes salariés. Les discours classiques du "fait des heures sup' non déclarées et ensuite, on parlera éventuellement d'un CDI" ou "on augmentera ton salaire lorsque tu auras fini ta période d'essai renouvelable" ne passeront plus. Il faut davantage s'attendre à de l'absentéisme, des sautes d'humeurs et des démissions soudaines. Sans oublier l'omniprésent téléphone portable, vissés aux doigts.

dimanche 11 mai 2014

CV à trous

C'est un peu une réponse à cet article d'Atlantico. Il traite des CV "à trous".

La consultante qui s'y exprime est dans son rôle. Son job, c'est de valider les candidatures pour le compte d'entreprises. Elle doit donc s'assurer de la véracité des CV et démasquer les menteurs. D'où un "attention, tout peut se vérifier". Tout en étant rassurant sur la justifications des "trous" dans le CV.

Dans la pratique, avec 3 millions de chômeurs, le candidat n'a pas de marge de manœuvre. Au point où une simple pause dans le discours (par exemple, pour se rappeler ce que l'on a fait dans l'entreprise x) peut être interprétée comme un mensonge. A contrario, de vrais mythomanes assez moyens passent entre les mailles du filet.

Pour en revenir aux "trous", que faire ? Effectivement, vous pouvez annoncer que vous avez repris vos études, que vous avez essayé de monter votre entreprise, etc. (NDLA : donc à mentir pour éviter de mentir !)
Le souci, c'est que beaucoup de recruteurs, dans les cabinets, sont des boutonneux encore bardés de certitude. Pour eux, chômeur = loser , point final. Sans oublier les interrogations sur la capacité d'un chômeur de longue durée à s'intégrer rapidement au rythme d'une entreprise. On veut des employés opérationnel dés le 1er jour.
Dans les PME, les personnes en charge du recrutement sont plus compréhensives. Un chômeur "actif" sera perçu comme quelqu'un de motivé. Sauf que justement, beaucoup de chômeurs sont complètement passifs. Un traumatisme lié à un licenciement, un enchainement d'entretiens loupés, des problèmes personnels, un sentiment d'abandon... Le chômeur finit par perdre toute motivation. Et ça, c'est un discours qu'aucun recruteur n'est prêt à entendre.