dimanche 2 mars 2014

Deuxième choix

Dans le processus de recrutement, l'entreprise est toute puissante. Ses désirs sont des ordres pour le cabinet de recrutement. Quant au candidat, on ne lui demande guère son avis. L'embauche traine volontiers en longueur. Untel VEUT voir les candidats, mais il part en vacances 15 jours. Et puis là, il y a un pont : on ne peut pas se décider maintenant. Et puis là, on n'a pas de budget ; il faut attendre le prochain trimestre pour recruter. Et puis finalement, on veut convoquer un 2e candidat pour le troisième tour.

Ce que les entreprises oublient, c'est que parfois, le candidat possède plusieurs "pistes". Bien sûr, en entretien, il jure que c'est vous son premier choix. En pratique, pourquoi serait-il loyal envers une entreprise qu'il connait à peine ? A fortiori si elle le fait languir ou qu'elle lui propose un job peu valorisant et sous-payé ? S'il est "intéressant" pour vous, il se peut qu'il intéresse aussi une autre entreprise.

Donc, parfois, lorsque enfin, l'entreprise prend enfin une décision, le candidat est déjà en poste ailleurs. Parfois (par vengeance ?), il dit oui et il ne vient pas le jour où il est censé commencer.
Première réaction des recruteurs : la colère. "Pourquoi est-ce que ce petit con ne veut pas bosser pour nous ?"
Deuxième réaction : "Faut appeler le 2e candidat, en espérant qu'il soit toujours libre..."
Pour la personne en question, c'est inespéré. Il s'est pris un "non" définitif il y a quelques jours, quelques semaines et voilà qu'on revient vers lui ! En prime, avec tout le retard accumulé dans le recrutement, le démarrage de tel poste devient urgent. Le rapport de force est inversé. C'est assez cocasse de voir, le recruteur, naguère hautain, supplier le candidat de venir ! En général, il se croit obligé de se justifier pendant 5 minutes. Le candidat peut profiter de l'opportunité pour renégocier son salaire à la hausse.
Bien sur, ce moment de grâce ne dure pas. Une fois en poste, cette histoire de premier ou de deuxième choix disparait.

jeudi 27 février 2014

Réunion conso

Qui dit chômage, dit souvent problèmes financiers. Bien sûr, pour toucher des indemnités, le chômeur n'a pas le droit de travailler. L'angle mort, ce sont les "études de consommateurs". Point de rémunération, mais des "remboursements de frais", non-déductibles des indemnités.

Bien sur, les études n'emploient pas les mêmes cobayes de manière récurrentes. Il faut donc s'inscrire à plusieurs études et au mieux, on peut participer à 1 ou 2 enquêtes par mois. Sachant qu'on touche entre 20€ et 50€ à chaque étude. Certaines se cachent sous le vocabulaire "discussions sur le thème de..." D'autres ont un nombre limité de participants : pas de chance pour les derniers (ils ont néanmoins parfois droit à "des remboursements de frais", mais moindre.)

Vous voilà dans une salle avec d'autres chômeurs de votre âge et de votre sexe (pour des questions de représentativité.) Cela débute par une brève présentation. Dans le lot, il y en a toujours un qui en a gros sur la patate. Il se plaint de sa reconversion forcée comme vigile (NDLA : Pole Emploi fourgue quasi-systématiquement des formations dans la sécurité aux fin de droits.)
Ensuite, on vous demande d'imaginer si vous utiliseriez le produit dans telle ou telle situation. Et sur votre lieu de travail, vous l'utiliseriez ? Les participants se projettent. Pendant quelques instants, les chômeurs redeviennent des employés, dans une situation plus ou moins imaginaire. On se prend au jeu. C'est toujours curieux de voir des adultes rêver à voix hautes.

Puis c'est fini. Vous passez prendre votre enveloppe et vous retrouvez votre vie de chômeur. Au moins, pendant une après-midi, vous avez oublié ce que vous étiez.

mercredi 26 février 2014

Quémandeur d'emploi

En théorie, le candidats a des droits et des devoirs vis-à-vis du recruteur. En théorie, le chômeur ne doit pas accepter n'importe quel poste, dans n'importe quelle condition. En théorie, il faut savoir rester digne.

Vous vous doutez bien que si j'écris "en théorie", c'est qu'en pratique, ça n'a rien à voir.

Seuls les novices sont assez fous ou inconscients pour refuser un job ou pour partir au cours d'un entretien. Eux, ils croient encore qu'ils valent mieux que cela.

Une fois, j'ai rencontré un chômeur qui sortait de 6 mois sans entretien. Non pas 6 mois de chômage, mais 6 mois sans décrocher le moindre entretien. Le jour où on lui a enfin dit : "Seriez-vous disponible le... pour un entretien ?" Il était fou de joie. Et pourtant, ce n'était qu'un entretien !
Autant dire que la dignité fait long feu chez un chômeur de longue durée. Vous voulez un emploi à tout pris. Et certains employeurs ne se gênent pas de vous rappeler qu'il y a 3 millions de candidats potentiels... L'attitude condescendante, voir méprisante est un grand classique. En entretien, j'ai eu droit à des réflexions racistes, à des questions très intimes, à des listes de justificatifs demandés au-delà de la légalité. Il y a les provocations gratuites, pour me "tester". Un recruteur m'a posé des questions de culture générale (j'avais l'impression de jouer au Trivial Pursuit !) Sans oublier les questions idiotes ou celles dont les réponses sont dans mon CV. J'ai eu des recruteurs qui m'ont posé des lapins. Parfois, c'est un collègue (qui n'a absolument pas lu le dossier) qui prend le relais. Récemment, mon rendez-vous avait une heure de retard et il puait l'alcool !
On veut des employés qui soient des combattants, mais on s'étonne que les candidats s'hérissent face aux brimades ! Donc, le chômeur doit prendre sur lui, accepter les insultes et les moqueries. Et surtout, garder le sourire, quitte à râler (ou à pleurer, c'est selon) une fois que l'autre a tourné les talons. Pour trouver un job, il faut enchainer les entretiens. Ce qui signifie "enchainer les entretiens infructueux". A la longue, c'est usant. Exactement comme un boxeur qui aurait perdu 10 combats d'affilée. Le risque, c'est de perdre l'habitude de se battre pour un emploi, lors de l'entretien. On attend les coups et le K.O. final.

mardi 25 février 2014

Profession : stagiaire

Le titre fait référence à cette BD.

Le débat actuel sur les stagiaires peut sembler saugrenu pour les profanes. Par "stage", d'aucun pensent à l'image d'Epinal de l'étudiant en BTS qui passe quelques semaine à faire du café, des photocopies et à jouer au démineur. Alors pourquoi une telle polémique ? Pourquoi évoquer des questions de rémunération ou de durée ? Après tout, un long stage rémunéré, ça existe déjà : c'est l’apprentissage !

Effectivement, parmi les stages, il y a ceux accordés aux enfants d'employés. Certaines entreprises prennent régulièrement des stagiaires auprès d'une école (parce que le patron est un ancien ou que l'école est au coin de la rue.) On reste dans le stage bon enfant. C'est un moyen pour l'étudiant de se familiariser avec le monde de l'entreprise (tant pour les bons, que les mauvais côtés.) Je garde d'excellents souvenirs de certains stages et de certains tuteur (le pseudo "Alain" est d'ailleurs un hommage à l'un d'eux.) Ca donne un peu d'expérience. Ca permet aussi d'apprendre à pipeauter afin d'enjoliver ce qui a été fait (le stage "machine à café/broyeuse de document" devenant une "mission à responsabilité".)
Certaines entreprises refusent les stagiaires. Elles avouent qu'elles n'ont pas le temps d'en prendre ou pas de missions à leur confier. C'est dur pour la personne en recherche de stages, mais au moins, elles sont honnêtes.

Le problème, c'est qu'il y a des dérives.
En général, les stages ont lieu l'été, après l'année scolaire. Ca tombe bien, l'été, les employés partent en vacances. Certaines entreprises se servent des stagiaires comme intérimaires gratuits. Je me rappelle une réflexion d'un ancien responsable : "On doit renforcer notre équipe commerciale... On doit trouver un stagiaire ! Faites le tour des écoles et demandez qu'on nous en envoi un !" Le droit du travail précise pourtant qu'un stagiaire ne doit pas servir pour faire face à un accroissement temporaire d'activité, occuper un emploi saisonnier ou exécuter une tâche régulière. Mais vous allez vous plaindre auprès de qui ? Ce que les entreprises oublient, c'est qu'un stagiaire est un débutant (donc maladroit) et qu'en tant qu'étudiant, il a un bon égo (il pense qu'il mérite mieux.) Comme m'a dit un stagiaire la semaine dernière : " Je suis payé 65% du SMIC, donc je bosse 65% du temps. " Et le chef qui cherchait des stagaires ? Il en a vu défiler 4 en 2 mois... Et il ne comprenait pas pourquoi il ne restait pas.
Dans les grandes entreprises, on passe carrément des offres de stages dans les sites de recrutement. En général, il s'agit de rédiger des rapports internes, de servir d'assistant pour un chef de service ou carrément de gérer un projet. Après, ces entreprises se plaindront de la fuite d'informations confidentielles... Ce sont des jobs de cadres, voir de cadres supérieurs. Ces entreprises vous font éventuellement miroiter un CDI. Ou bien, elles vous diront que c'est une expérience valorisante pour votre CV. Bien sûr, le jour où le stage se termine, point de CDI. A moins d'être naïf, vous vous êtes bien rendu compte qu'on vous a enfumé. D'où une productivité en berne sur la fin. Votre tuteur ne se met pas à votre place. Quelques mois plus tard, lorsqu'un employeur potentiel appelle pour "prendre une référence", il vous saquera en règle...
Les pires situations sont dans les secteurs artistiques, culturels, l'événementiel et le social.Il y est très difficile de décrocher un CDI. Les débutants vont de stages en stages, quitte à s'inscrire à des formations bidons. Les employeurs sont des entreprises de service, qui facturent de la prestation. Pour casser les prix, il leur faut des stagiaires. Et pour traiter simultanément plusieurs dossiers, elles recrutent des bataillons de stagiaires. Ces entreprises ont beau jeu de dire qu'avec des CDI, leurs finances seraient plombées. En fait, l'emploi massif de stagiaires est au cœur de leur modèle économique ! Voilà pourquoi il a fallu limiter le nombre de stagiaires par entreprises, la durée des stages et imposer une rémunération minimum. L'allié objectif de cette exploitation, ce sont les nombreuses formations en communication, en art, en sciences sociales, etc. qui n'offrent aucun débouchés. D'où ces flots permanents de stagiaires. Mais si vous touchez à ces formations, on vous traitera d'anti-intellectuel, d'assassin de la culture, etc.

lundi 24 février 2014

ô solitude...

J'écris cette note suite à ce témoignage.


Depuis les vagues de suicides chez France Telecom et chez Renault, on commence à parler de stress, de surmenage, de dépression, de burn-out... Avant, on pensait que les pathologies liées au travail étaient réservées aux ouvriers. Le cadre est dans un bureau, au calme et comme il est bien payé, il n'a pas de problèmes de fins de mois. Donc, il ne peut pas souffrir, non? Ce n'est que récemment qu'on prend en compte les facteurs de stress des cadres : objectifs impossibles à atteindre, menaces de licenciement, harcèlement moral... Sans compter les facteurs conjugaux et extra-professionnels, car un employé ne laisse pas ses problèmes personnels à l'entrée de l'entreprise, le matin. De même qu'il ne laisse pas ses problèmes professionnels sur son bureau, le soir. Ainsi, face à un situation stressante, chacun est plus ou moins armé. Et certains craquent.
Au cours de ma déjà longue carrière, j'en ai vu, des personnes imploser. J'ai vu une femme perdre 10 kilos en un mois. J'ai vu une intérimaire, harcelée en permanence, démissionner en pleurant. J'ai vu des alcooliques, dont l'alcool servait d'auto-médication. Un ancien collègue, ne supportant pas d'être en arrêt-maladie, s'est suicidé. Personnellement, je n'ai jamais eu de burn-out. Une fois, j'ai eu de gros problèmes personnels. Je me réveillais en pleine nuit. Je me mettais à pleurer pour un rien. J'avais l'impression d'étouffer. Au travail, un jour, j'ai eu un blocage. J'étais pétrifié devant mon écran. Pour une fois, perdre mon emploi a été une chance. Ça m'a permis de prendre du recul. De me déconnecter avant de péter un câble.

Le premier problème, c'est que le salarié n'ose pas évoquer ses soucis et agir en conséquence. Le fait de ne pas arriver à gérer le stress quotidien est vécu comme un échec supplémentaire. De mémoire, je n'ai vu qu'une seule fois un salarié, récemment promu chef d'équipe, avouer que manager le stress et reprendre son ancien emploi. Beaucoup ont tendance à minimiser cela, à dire qu'ils "se sont levé du mauvais pied". D'autres ont tout simplement peur qu'on les licencie si on découvre leurs faiblesses (ce qui est parfois le cas.) Perdre son emploi est considéré comme le pire scénario, donc on préfère s'enfermer dans ses problèmes.
Le second, c'est la couardise des collègues et responsables. Le monde du travail est un monde égoïste. Dans La crise, Coline Serreau explique à Vincent Lindon que ses problèmes de séparation et de chômage, c'est triste, mais les autres ont davantage de soucis ! Circulez, il n'y a rien à voir. Vos collègues ne veulent pas avoir à faire à des problèmes trop personnels, trop intimes.
Quant aux responsables, ils veulent éviter à tout prix les confrontations. Face aux doléances, c'est souvent du "si t'es pas content, la porte est ouverte". On ne cherche pas non plus à désamorcer les conflits interpersonnels. La politique de l'autruche est la règle. J'ai connu une chef de service qui exigeait des assistantes jeunes et jolies, pour mieux les harceler (au moins moralement) ensuite. C'était de notoriété publique. Elles démissionnaient au bout de quelques semaines, parfois en pleurs (voir plus haut.) Mais on continuait de lui fournir de la chair fraiche. Dans une autre entreprise, mon prédécesseur ne supportait plus la comptable (dont le bureau était mitoyen.) Cette dernière passait ses journées au téléphone (pour des appels personnels, évidemment.) Un jour, il a craqué et il a voulu la poignarder avec des ciseaux. L'assaillant a été viré (d'où mon arrivé) et la comptable continuait ses interminables coups de fils personnels.
En théorie, les RH sont là pour assurer le service après-vente du personnel. S'il y a bien des gens chargés de détecter et de traiter le stress, ce sont eux. En pratique, ils sont souvent méprisants ou incompétents. "On peut rien faire pour vous. Par contre, si votre médecin vous préscrit un arrêt-maladie, il ne faudra pas oublier de nous l'envoyer."

dimanche 23 février 2014

1 entretien, 2 entretiens, entretien rouge, entretien bleu

Au cinéma, trouver un emploi, c'est assez simple. Il suffit de réussir un entretien. Généralement, ça se fini par une poignée de main du chef, accompagné d'un "bienvenue parmi nous". Fondu au noir, scène suivante.

En pratique, pour le moindre job dans une PME, vous devez passer plusieurs filtres. Il est vrai que les recruteurs sont submergés de CV. Le tri est obligatoire. En même temps, les descriptifs des offres d'emploi sont souvent hyper-vagues (les cabinets ont peur qu'un concurrent leur pique l'affaire.) Beaucoup de personnes envoient leurs CV en toute bonne foi, ne se sachant pas hors des pré-requis.
- On commence par l'entretien téléphonique. Autrefois, c'était juste une prise de rendez-vous. Désormais, le stagiaire du cabinet de recrutement vous fait passer un vrai entretien. C'est son supérieure qui lui a filé la pile de CV. Il téléphone sans les avoir lu, d'où des questions indigentes : "Vous n'indiquez pas vos diplômes ? - Ben si, abruti, au paragraphe "diplômes". - Ah oui, lol mdr."
- Vient ensuite l'entretien chez le cabinet de recrutement. Bien sur, il n'a pas lu les éventuelles annotations du stagiaire et il vous pose peu ou proue les mêmes questions que lui. S'il vous a fait remplir un épais dossier, il ne l'a pas lu non plus. En tout cas, si c'est gagné, il mettra votre CV dans la pile de ceux envoyés au client.
- Le premier entretien chez votre éventuel employeur. Après des jours d'attentes, on vous rappelle : vous avez passé le 2ème filtre. En bonus, on vous donne enfin le nom de votre employeur potentiel et le type de mission que vous feriez. Bien sur, lors de ce "premier entretien", vous découvrez que le cabinet de conseil a enjolivé le travail, le salaire et le potentiel de développement.
- Le deuxième entretien. Avec un peu de chance, vous pourrez enchainer les deux entretiens à la suite. Souvent, lorsque ça marche, l'entreprise vous convoque en direct. Le cabinet est rarement au courant du nom des candidats de la "short list". Parfois, c'est même lui qui vous appelle pour connaitre le dénouement !
- Le troisième entretien. Certaines entreprises vous font rencontrer votre éventuel chef, son propre chef et le DRH (sans ordre précis.) Depuis l'entretien téléphonique, il s'est parfois écoulé un mois (NDLA : alors qu'au début, c'était du "tout de suite maintenant".) La standardiste commence à bien vous connaitre. On vous fait visiter l'entreprise, rencontrer vos éventuels collègues. Si vous parvenez au dernier entretien, c'est que vous faites parti d'une liste de 2 ou 3 candidats. Tout est possible. Soit vous êtes le chouchou et c'est clair que vous reviendrez lundi matin. Soit tout est encore ouvert et vous devez rester sur vos gardes. Soit, ce n'est pas vous le chouchou et on vous a convoqué juste pour se convaincre que votre rival est le meilleur.

Et enfin, après tout cela, on vous rappellera peut-être pour vous dire que l'on vous a choisi. Pas d'effusion ou de poignée de main. Vous viendrez le lundi matin avec votre carte d'identité et votre carte vitale.

jeudi 20 février 2014

"T'as pas vu Christophe?"

L'anecdote est si compliquée que je vais devoir utiliser les prénoms (modifiés.)

A une époque, je travaillais dans une entreprise avec un directeur technique, François. Seulement, François était plutôt du genre chercheur solitaire, dans son laboratoire. D'ailleurs, une fois à la retraite, il a continué à faire des expériences pour nous, dans son garage.
La direction refusait toute confrontation frontale. Donc, au lieu de recadrer François, l'entreprise a promu un ingénieur, Christophe, au rang de directeur technique. Christophe avait un rôle de responsable hiérarchique du bureau d'études... Sauf que Christophe avait un sale caractère. Il refusait de gérer les ingénieurs qu'il n'aimait pas. Quant au projet peu valorisants, il les balayait d'un "j'ai pas le temps" ou d'un plus subtil "je n'ai pas les ressources pour" (NDLA : en sachant pertinemment que jamais, l'entreprise n'embaucherait.) Du coup, lui aussi avait tendance à s'enfermer dans son bureau.

Du coup, lorsque François est parti à la retraite, l'entreprise a recruté un troisième homme, Rui. Cette fois, c'était davantage un chef d'équipe qu'un ingénieur. Les ingénieurs, habitués à être autonomes, ont mal pris cette reprise en main du bureau d'études. Néanmoins, celui qui l'a le plus mal pris, c'était Christophe.
Ca n'a jamais été un bourreau du travail. Mais avec l'arrivée de Rui, il a clairement décidé de ne plus rien faire. Sa spécialité, c'était de faire le mur. Il partait vers 14h30-15h (voir 11h si le PDG était en déplacement pour la journée.) Sa technique consistait à laisser la porte ouverte, avec des dossiers ouverts sur son bureau. Comme s'il était dans les parages (vu que lorsqu'il est là, il fermait la porte.) Une astuce digne d'un adolescent. Le gag, c'est que Christophe avait une XM, avec un diesel qui claquait bien à froid (et il ne partait pas tant que le moteur n'était pas chaud.) On entendait bien le bruit, où qu'on soit dans l'entreprise.
Ainsi, toute la société savait que Christophe était parti pour de bon. Ensuite, le jeu consistait à jouer les faux-naïfs : "Où est Christophe ? Tu ne l'as pas vu ? Sa porte est ouverte, il ne doit pas être loin..."