jeudi 20 février 2014

Le travail ne paye pas

Les "zappés" ont souvent beaucoup de rancœurs envers leur ancienne école/université.

Des études supérieures, la TV et le cinéma montrent surtout les fêtes interminables avec alcool à gogo et frénésie sexuelle... Mais les soirées représentent à peine 10% du quotidien des étudiants. Les fêtards ne font guère long feu dans les amphis. Car les études, c'est avant tout des examens à préparer, des dossiers à rendre, des exposés à rédiger... S'y ajoute la précarité financière. Les provinciaux sont obligés de louer une "studette" (une cage à lapin louée à prix d'or.) L'achat d'un ordinateur, avec imprimante et box internet est obligatoire (vu que la "salle informatique" possède 10 ordinateurs pour 5000 étudiants...) L'école vous impose de ruineux frais de scolarité (sans oublier le racket des "mutuelles".) Au point où les étudiants les plus modestes sont obligés de travailler en parallèle. D'autres prennent des prêts étudiants.

Grosso modo, quel que soit le cursus, le plus dur, ce sont les premières années. Aujourd'hui, le bac est quasiment donné. Les examens d'entrée sont rares (voir proscrits en université.) Alors d'emblée, en post-bac, on submerge les élèves de travail. Cela permet de faire de la sélection de fait. Un gros quart des étudiants abandonne en première année. La moitié partiront au bout de la seconde. Seul un quart des élèves iront jusqu'en dernière année. Ces survivants ont la foi. Les profs se rient de leurs inquiétudes : "Le chômage ? C'est un problème de losers ! Les entreprises se bousculent pour embaucher nos étudiants ! Et pour leur proposer de beaux postes ! Regardez Dufour, de la promotion 2010 : il siège désormais au conseil d'administration d'une multinationale ! " Les écoles privées (donc payantes) ont un discours bien rôdé : "Notre école est chère, mais dés la remise du diplôme, vous aurez un job à responsabilité et vous serez rentré dans vos frais." Certains font même miroiter des stages de fin d'étude payés 2 000€ par mois...

Nos étudiants sont galvanisés. Surendettés, lessivés, mais confiants en l'avenir. Après des années de labeur, ils ont enfin le précieux diplôme... Et le réveil s’avère douloureux. 17% des diplômés d'école d'ingénieur trouvent un travail dans les 3 mois (dont une partie a transformé son stage de fin d'étude en CDD ou en CDI.) Au bout de 8 mois, le chiffre atteint 88%. En creux, cela signifie que 12% des diplômés n'ont toujours pas de travail (et l'on ne parle même pas des non-diplômés ou de ceux qui n'ont pas le statut d'ingénieur.) 8 mois, cela veut dire qu'un étudiant diplômé en septembre restera sans activité jusqu'en mai de l'année suivante. Et par "travail", on entend "n'importe quel travail". Après 8 mois, vous ne faites plus le difficile : vous étendez votre recherche au télémarketing ou à la restauration rapide. 5 années d'étude et des dizaines de milliers d'euros dépensés pour griller des steak hachés !
On peut comprendre qu'après ça, certains soient aigris...

mercredi 19 février 2014

Préavis

Dans les films, tout semble simple. Le héros est convoqué chez le directeur. On lui dit "Lambert, on va être obligé de se séparer de vous." Ou bien, parce qu'il a trouvé un meilleur job, le héros fait un bras d'honneur au directeur. Et la scène suivante, on le voit rentrer chez lui, un carton d'affaires sous le bras...

Sauf que ça ne peut pas se passer comme ça dans la réalité. A moins que vous soyez en fin de contrat ou que vous ayez commis une faute lourde, vous avez un préavis. Si votre film était réaliste, votre héros se fait virer ou bien il part, mais il doit revenir le lendemain matin. Et le surlendemain aussi ! Et ainsi de suite pendant 3 mois (1 mois, si vous n'avez pas un statut cadre.) Même en rupture conventionnelle, vous avez au moins 4 semaines de préavis.

Après cela, bienvenue dans une période de malaise ! Dans les grandes entreprises, vous êtes perdu dans l'anonymat du nombre. Vous êtes là et un jour, votre bureau est vide. En cas de vague de licenciement, vous pouvez ruminer collectivement vos rancœurs. Mais dans le PME et si vous êtes le seul à quitter l'entreprise, vous serez un pestiféré. Les plus ambitieux ne veulent pas être vu avec le renégat ! D'autres auraient presque peur que le licenciement soit contagieux ! C'est triste de voir que des collègues, que vous connaissez depuis des mois, se mettent à vous fuir.
Vous voilà donc seul. Souvent aussi, on ne vous confie plus aucun gros dossier. Tous les experts vous diront qu'il ne faut pas partir en mauvais termes avec votre employeur. Lors de votre recherche d'emploi, des cabinets risquent de l'appeler pour se tuyauter sur vous. Vous êtes donc prié de travailler d'arrache-pied jusqu'à la dernière seconde. Sauf que l'on n'est pas chez les Bisounours ! On vous a viré, vous n'avez rien à faire de vos journées et à la machine à café, on vous esquive. En prime, vous avez déjà un pied dehors. Et après ça, vous devriez rester calme, souriant et garder un mental de winner ? La plupart des gens se contenteront de marathons de démineur. Les plus fragiles fondront régulièrement en larmes ou auront des crises d'angoisses. Les plus nerveux prendront à parti collègues ou responsables. Ceux qui démissionnent sont dans une autre optique. Eux, ils vous expliquent qu'ils quittent l'enfer pour le pays du lait et du miel. En permanence. Par exemple, à la cantine, c'est : "Quoi? Encore des choux de Bruxelles ? Dans ma nouvelle boite, il y a 3 restaurants d'entreprise, dont 1 étoilé au Michelin !"
Et le pire, c'est que cette situation transitoire durera 3 mois. A la limite, le coup du départ définitif avec carton sous le bras, c'était pas si mal...

lundi 17 février 2014

Pole emploi : entretien collectif

Parfois, il y a un peu de variation dans les entretiens de Pole Emploi. On vous convoque pour une "réunion d'information". Concrètement, vous vous retrouvez dans une salle avec une demi-douzaine de chômeurs. Bien sur, ça ne commence pas à l'heure (car les conseillers ont d'autres choses à faire.) Les profils sont très hétérogènes : pré-retraité, fin de droit, artiste, artisan... A croire que c'est fait exprès, afin d'avoir un échantillon des différents chômeurs.

Un conseiller joue les animateurs. S'il est en mode "minimum syndical", il va se contenter de faire l'appel. Vous signez votre feuille de présence, puis Ciao !

Par contre, s'il doit former quelqu'un d'autre ou que c'est un idéaliste, l'entretien va durer. Chacun se présente, évoque le type d'emploi qu'il recherche et ce qui l'empêche de retrouver du travail... Au moins, il y a une constante : que vous soyez ouvrier ou cadre, les employeurs cherchent des personnes surqualifiées et sous-payées. Au moins, la parole est plus ou moins libre. Certains en profitent pour pousser un coup de gueule. Le fin de droit fond quasiment en larme. Dans le lot, il y en a toujours un de pressé, qui a "un truc important à faire".
Pendant ce temps, le conseiller prend des notes (soit sur un paper-board, soit sur des feuilles volantes.) La réalité, c'est qu'il ne peut pas grand chose pour nous.Le fin de droit, en voie de clochardisation ? Pas son problème (il s'occupe des chercheurs d'emplois, point) ; il ne lui filera même pas un numéro d'assistante sociale. Une fois que tout le monde a exposé ses griefs, il fait un débrief plein de lieux communs (sous oublier le fameux "réseau" et le "marché caché de l'emploi".) Et enfin, on peut rentrer chez nous.

dimanche 16 février 2014

On a un dossier sur vous

A se demander pourquoi vous faites des CV ! Désormais, chaque cabinet de recrutement, chaque grande entreprise vous demande de remplir un dossier complet. Vous devez détailler vos précédentes expériences (nom de l'entreprise, mission(s) précise(s), date d'arrivée, date de sortie...) et bien sur, donner au moins un contact qui vérifiera vos dires. Sans oublier les justificatifs à apporter le jour de l'entretien.

Vous allez passer une bonne heure dessus. A priori, un chômeur, ça a du temps à perdre. Beaucoup de temps. En plus, il faut reconnaitre que beaucoup de CV sont mal faits. Sauf que le plus souvent, c'est pour une candidature qui n'aboutira pas. Vous ne faites que grossir une "candidathèque". Personne ne le lira (d'ailleurs, ça vous permettra de postuler deux fois au même endroit après avoir bidonné votre CV." Et qu'on vous demande, encore et encore, de ressasser vos souvenirs. Les boites qui vous ont jeté, celles où vous vous êtes ennuyés, celles qui vous ont déçu, celles où vous avez laissé passer des opportunités... Il n'y a pas mieux pour vous donner un coup de cafard !

Si vous refusez, le cabinet peut s'offusquer : "Comment ? Vous refusez de remplir mon dossier ?" Un hypocrite vous expliquera que cela fait parti "de sa démarche qualité". Le plus souvent, il se fait menaçant : "Vous savez, nous sommes très à cheval sur le bon remplissage des dossiers." En pratique, lorsqu'il y a un emploi à pourvoir urgemment, on saura s’accommoder de votre absence de dossier...

jeudi 13 février 2014

Mon entretien le plus drôle

Pour finir cette semaine sur une note joyeuse, voici une anecdote rigolote.

Mon premier entretien, c'était pour un stage de 3 jours. Le patron voulait embaucher 2 stagiaires. Je suis arrivé à l'heure, en costume-cravate. Aucune trace de mon camarade de classe. L'entretien débute et mon futur patron m'explique le travail. Puis, enfin, l'autre arrive... En pantalon en velours et pull affreux, par dessus une chemise à carreau. Il était venu en mob' et il se baladait avec son casque avec flèches réfléchissantes sur les côtés... Et surtout, avec la braguette ouverte et un pan de chemise sortant par l'ouverture !

Je lui signale discrètement que sa situation et l'autre, sans se démonter, il se rhabille bien en face du patron !

La suite fut du même tonneau. Il a écorché le nom de notre interlocuteur (plusieurs fois), lui a dit "bonjour" à la fin, etc.


Pendant une heure, j'ai essayé de garder mon sérieux. Une fois dehors, tandis que l'autre chevauchait son 103 SP (avec les sacoches à l'arrière), j'ai hurlé de rire.

Et le pire, c'est qu'on a été tous les deux pris en stage !

Les nocturnales

Au cours de ma (déjà) longue carrière, il m'est arrivé de faire des petits boulots. J'ai travaillé la nuit, le week-end... Par contre, dans mes jobs "normaux", j'ai rarement travaillé tard... Ne serait-ce que parce que mes employeurs ne voulaient pas me payer mes heures supplémentaires. Pourtant, presque toujours, j'ai vu des gens rester jusqu'à 19h, voir 20h ou d'autres démarrer à 7h.

Je les classe en plusieurs catégories :
1) Le fumiste. Il est toujours "super débordé". Cela fait des mois qu'il est censé travailler sur un projet. Vous lui confiez un travail urgent, il vous répond, d'un air moqueur : "Je peux te caser un créneau dans 3 mois !" Le soir, il est le dernier à partir. En fait, il passe ses soirées à jouer au solitaire ou à surfer sur le web. Le pire, c'est que souvent, ça marche. Les patrons de la vieille école sont persuadés que la performance est fonction du nombre d'heures passées au bureau.
2) Le no-life. S'il reste tard au bureau, c'est parce qu'il n'a pas envie de rentrer chez lui. Le no-life féminin est généralement une célibataire endurcie et isolée. Le no-life masculin est plutôt le jeune père de famille qui veut éviter les braillements du petit dernier. Une fois que les enfants ont grandi, il a tendance à effectuer moins d'heures supplémentaires. Par contre, la célibataire risque de s'isoler toujours plus, refusant toute vie sociale parce qu'elle est débordée.
3) Le sous-dimensionné. Lui, au moins, il bosse réellement ! Soit on le force à faire le job de 2 personnes (suite à un congé maternité ou à un départ en retraite, par exemple.) On lui a promis que c'était temporaire. Mais ensuite, avec la crise tout ça tout ça, il n'y a plus le budget pour recruter quelqu'un... Donc c'est du provisoire qui dure. Soit c'est la personne dépassée par son boulot. Un logiciel mal maitrisé, des responsabilités trop importantes... Il n'est pas à la hauteur. Donc, il reste plus tard pour rattraper le retard. L'un dans l'autre, le sous-dimensionné risque le fameux "burn-out".
4) L'horaire décalé. C'est le chef de service "cool". Il débarque à 10h du matin et s'offre 2h de pause déjeuner. Donc, forcément, il est vite 18h pour lui. A 15h15, il vous dit : "On se fait la réunion hebdo dans 5 minutes ?" Puis, à 17h59, c'est "allez hop, tout le monde en réu' ! " Et bien sur, personne ne va lui faire remarquer que la journée est finie...

mardi 11 février 2014

Pole emploi : l'entretien

Après l'inscription à Pole Emploi, vous avez droit à un entretien.

C'est assez basique : on vous demande votre dernier diplôme, vos langues parlées (2 maximum), vos précédents emplois, vos méthodes de recherche d'emplois... Pas besoin de justificatifs ; on vous croit sur parole.
C'est de la bureaucratie appliquée. Comme si vous parliez à un serveur vocal en chair et en os. Il serait tout à fait possible de remplir votre dossier de chez vous. Mais on est persuadé qu'il faut que vous vous déplaciez régulièrement à Pole Emploi. Ca sert à vous fliquer et accessoirement, ça justifie l'embauche de conseillers.
On vous pose des questions et le conseiller note vos réponses en les enrobant de formules toutes faites. Avec un peu de chance, il ne quittera pas son écran des yeux. Parfois, il refuse même de vous serrer la main. En matière de recherche d'emplois, on va vous demander si vous avez un "réseau" et si vous faites des "candidatures spontanées". Un conseil : pour éviter le laïus sur les "offres invisibles", dites que oui, vous faites du réseautage.

De toute façon, on ne peut rien faire pour vous. Les chômeurs prioritaire, ce sont les bac-10 en fin de droit. En tant que cadre, on aura vite fait de vous classer "autonome" ; autrement dit "démerdez-vous !"

Après chaque emploi, le "premier entretien" est obligatoire. La première fois, j'y allais en costume, avec des justificatifs sous le bras et des questions à poser. Maintenant, c'est jean-baskets et main dans les poches.