jeudi 18 décembre 2025

White town, de Clair Obscure à Rosa Parks


Scandale lors d'une remise des prix du jeu vidéo : tout le personnel du studio Français Sandfall Interactive est blanc !

Les dirigeants se sont défendus de tout racisme. C'est tout simplement représentatif de la sociologie des employés du secteur.
D'après l'INSEE, dans l'informatique, seul un quart des employés sont des employées. La faute à des emplois nécessitant des compétences très spécifiques et où il y a des horaires à rallonge. A demi-mots, le site Grande Ecole du Numérique avoue que les femmes jettent l'éponge au premier enfant.
Et les immigrés ? Toujours d'après l'INSEE, près des deux-tiers des immigrés du continent africain n'ont pas dépassé le collège. Chez les enfants d'immigrés du continent africain, un gros tiers a poursuivi après le bac. Sachant que les femmes font remonter la moyenne. Alors que chez les Français "de souche", quatre personnes sur dix, toute classe d'âge confondue, a dépassé le bac. Les chiffres confirment la réalité du terrain. Dans une culture très patriarcale, on préfère travailler tôt. Opter pour un métier manuel, l'artisanat ou le commerce, afin d'être son propre patron.

Les grands groupes peuvent s'offrir le luxe de la diversité. Ils créent des emplois nécessitant moins de compétences théoriques, car statistiquement, c'est là qu'ils trouveront davantage de profils "atypiques". Une PME comme Sandfall Interactive a besoin d'employés utiles. A commencer par une armée de développeurs. Ils n'embauchent que des hommes blancs, car statistiquement, il n'y a que ça sur le marché !

C'est un gros problème, car plus largement, il y a un décrochage. On a longtemps pensé que la cause du problème des banlieues, c'était un enclavement. En 1996, Alain Jupée fit voter une loi, créant des zones franches urbaines. Les entreprises s'installant au pied des cités disposaient d'avantages fiscaux. Sauf que la France d'aujourd'hui crée surtout des emplois tertiaires et souvent hautement qualifiés. J'ai eu l'occasion de travailler dans des bureaux d'études situés en pleine banlieue. Il y avait le sentiment d'être dans une exclave ; un îlot de blancs, au chœur de la cités. L'entreprise était d'ailleurs souvent ceinturée de grilles. Mis à part la sécurité et l'entretien, aucun emploi n'avait été créé sur place. Et bien sûr, aucun employé n'habitait à proximité de l'entreprise. Le soir, tout le monde reprenait sa voiture et partait au loin.
Les habitants des cités ne profitent donc pas de l'installation de ces entreprises. Un exemple édifiant, c'est la Silicon Valley. Dès l'après-guerre, des entreprises de la "tech" se sont installées autour de San Francisco. C'est tout un écosystème qui s'est créé... Mais seuls les blancs et les Asiatiques en tirent les fruits. 5% des habitants de la Silicon Valley sont noirs, mais seuls 3% travaillent dans une entreprise de la Silicon Valley. C'est encore pire pour les latinos : il représentent 39% de la population locale, mais seulement 8% des emplois du secteur de la tech. Et si l'on retire la sécurité ou l'entretien... Pourtant, de nombreux patrons de start-up sont d'ardents démocrates. Depuis les années 90, nombre d'initiatives ont été lancées, quitte à écarter les hommes blancs qui postulent. Sans aucun résultat.
Aux Etats-Unis, riches et pauvres se croisent à peine. Chacun reste dans son quartier, souvent avec des gens de son ethnie. En France, on tient à mélanger. Le cas du quartier Rosa Parks à Paris, créé en 2015. Encore une fois, on rêvait de créer des emplois dans un quartier défavorisé. Sauf que la jonction n'a pas eu lieu. L'insécurité et l'insalubrité ont d'abord chassé les PME et les start-up. Parcourir les 800 mètres entre le RER et la BNP étaient un chemin de croix. Face à l'insécurité, la banque a dû définir des "no-go zones". Puis elle a recruté 18 agents pour accompagner le personnel. Finalement, à l'automne, la banque a préféré faire ses valises.

Depuis le disposition zones franches a été remanié. Les "territoires entrepreneurs" imposent un quota de 50% de salarié résidant sur place, dans des quartiers difficiles. De même, le dispositif "d'emplois francs" incite les entreprises à recruter localement. Impossible de trouver des chiffres. La réalité des faits, c'est que les habitants des cités ne peuvent, ni ne veulent travailler dans ces entreprises.
Les employés regardent le monde au-delà des grilles de l'entreprise comme un monde sauvage. Les salariés Maghrébins ou noirs étant souvent ceux tenant un discours très dur. Eux, ils s'en sont sorti, pas les autres.
Quant aux banlieusards, ils ne voient pas ces entreprises comme une opportunité d'emploi ou des retombées (car souvent, les communes refont les routes menant aux zones industrielles, elles ouvrent des lignes de bus, etc.) Ils n'y voient que des envahisseurs. Des gwer. Lorsque BNP ferme ses bureaux de Rosa Parks, c'est un "bon débarras".

lundi 6 octobre 2025

Chute en direct


J'ai un nouveau voisin : un chef de service.

Il vient tout juste d'offrir une promotion à un presta. Pour son premier lundi dans son nouveau costume, le prestataire a commis deux impairs coup sur coup. Il s'est excusé et a promis qu'il ne recommencerait plus.

Quelques minutes plus tard, le chef débarquait dans mon bureau, furieux. Il appelait la boite de prestation et exigeait un nouveau prestataire. Le cabinet, confus, lui envoya des CV d'autres candidats à peine le téléphone raccroché.

Je ne connais pas plus que ça le prestataire ou son responsable. Le responsable est-il trop sévère ou bien les fautes étaient-elles éliminatoires ? Je n'en sais rien. Néanmoins ça m'a rappelé de mauvais souvenirs... Hiérarchiquement, je devrais être du côté du responsable. Mais de par mon histoire, je me suis identifié au prestataire. Et ça m'a fait revivre des évènements douloureux.
Au cour de la journée, j'ai croisé le prestataire. Il avait l'air détendu. Il pensait sans doute qu'avec ses excuses, il a rattrapé le coup. C'était un gros grain, mais il est sorti de la tempête. Peut-être même que dans les prochains jours, il fera des efforts. Ce qu'il ne sait pas, c'est ce qui se trame dans son dos. Il est déjà condamné. Ses efforts sont vains ; la sentence est irrévocable. 
Son chef a déjà pris sa décision. Pire : son chef est déjà dans l'après. Mon voisin avait en effet refait son planning, le processus de prise de post du nouveau est gelé. Il s'est prévu des plages d'entretiens. Après l'appel au cabinet de prestation, il est d'un calme olympien.

La suite, je la connais trop bien. Une fois le remplaçant sélectionné, notre gaffeur sera convoqué au bureau. Un discours bref, mais tranchant. Puis ça sera le "deuxième dernier jour", car le prestataire s'est grillé auprès de son cabinet.

jeudi 25 septembre 2025

Le livre qui n'existe pas


En cette rentrée, vous avez le marronnier des marronniers : le livre de profs. A chaque fichue rentrée, des profs se plaignent de la baisse de niveau des élèves, des directives inapplicables de l'académie, de la couardise du rectorat... Effet Samuel Paty, les profs se plaignent désormais du communautarisme.

En revanche, point d'ouvrages de cadres ou de managers du tertiaire. C'est un continent quasi-inexploré.
Il est vrai que souvent, les profs écrivent bien (notamment les profs de français...) Et quoi qu'ils en disent, ils ont du temps libre. Enfin, entre profs, ils ont l'habitude d'animer des débats, d'argumenter, de pousser des idées...
A contrario, les cadres ont rarement la fibre littéraire. Ils sont souvent très occupés. Et le padevaguisme est encore pire que dans les établissements scolaires. Il n'y a pas de discussions franches : soit vous êtes d'accord, soit vous partez (ou l'on vous sort.)

Concernant nos élèves à problèmes, faute de littérature dédiée, d'aucuns a l'impression qu'à l'âge adulte, les problèmes s'estompent.
Ca a été vrai. Pendant longtemps, les élèves turbulents, les illettrés, les cas sociaux, c'était de la chair à lycée technique, voire à lycée professionnel. Dans les usines d'autrefois, les bureaux étaient un espace protégé de la plèbe. A contrario, les femmes évitaient de s'aventurer dans certains coins de l'atelier... Vous aviez aussi des individus qui finissaient par murir. Grâce à un effort d'introspection, ils finissaient par rentrer dans le rang.
Mais la baisse du niveau générale est telle qu'on ne parle plus d'individus isolés. Du coup, la barre a été baissée, encore et toujours. Donc, votre graine de taliban, le bas du front ou la punk à chien, il se retrouve avec un Master 2 et il atterrit dans un bureau ! Et pourquoi aurait-il pris du recul ? Leurs parents se sont comportés en copains. Les profs se sont comportés comme des animateurs. Sur les réseaux sociaux, des influenceurs les encouragent à "être eux-mêmes", de demander au monde à s'adapter à eux (et non l'inverse.) Au travail, les jeunes ont donc du mal à assimiler le concept de hiérarchie, de règles. A l'école, vous pouvez toujours tricher aux examens ou demander à l'intelligence artificielle de vous rédiger un dossier. Au travail, les échappatoires sont plus rares. Surtout en début de carrière. Ils restent également persuadés d'avoir beaucoup de droits, sans aucun devoir. Pour autant, le grief principal, c'est que les jeunes n'ont pas conscience qu'il faut agir et parler différemment en fonction de son interlocuteur. Le repris de justice aura tendance à vouloir toujours avoir le dernier mot, quitte à prendre à parti ses collègues. Durant les réunions, la gauchiste à cheveux fluos voudra faire la leçon sur les mentalités "coloniales" et la "domination masculine". Sans oublier la personne a priori normale qui ponctue ses phrases de "ça dit quoi ?", "wesh", "la dinguerie", etc.
Les managers, ils s'en foutent. Pour le RSE et Egapro, ils ont dû "élargir le recrutement". Ils se retrouvent avec des jeunes interchangeables, qui démissionnent au bout de six mois. La théorie du radeau revient en force. Sauf qu'en cas de pépin, les managers foncent dans le radeau et ils larguent les amarres ! A quoi bon se griller auprès de la hiérarchie pour quelqu'un qui compte bientôt prendre une année sabbatique ?
Vous répondrez qu'après tout, tous les vieux chênes ont commencé par être un gland. Rien de grave donc ; on est tous passé par là. Sauf que les choses se sont vraiment dégradés avec la génération Y. Une génération qui a aujourd'hui dépassé la trentaine. Or, ils n'ont toujours pas muri. Là encore, c'est souvent faute de remise en cause. Aucun manager n'osera dire ses quatre vérités à un employé problématique. Généralement, ils se renforcent dans leurs défauts. Un ado qui commence toutes ses phrases par "frérot...", c'est lourdingue. Un trentenaire qui fait cela, c'est juste ridicule. Surtout, professionnellement, votre génération Y "wesherelle", il n'a aucune valeur ajoutée par rapport à un junior. D'où une progression quasi nulle.

lundi 4 août 2025

Chiens de prairie

Lorsque j'ai débuté, l'informatisation était balbutiante. La moindre extraction de donnés prenait parfois des heures. Une partie du temps était passé à ouvrir le courrier. Le fax était également chronophage, car la mémoire de la machine était limitée. Impossible d'enchainer les envois : vous deviez attendre qu'il ait envoyé des documents et qu'il ait de nouveau de la mémoire libre. Enfin, de nombreuses archives étaient uniquement disponibles sur papier. Donc, vous deviez traverser tout le site, pour avoir votre information.

Aujourd'hui, tout a été numérisé, automatisé, etc. De nombreuses taches chronophages ont disparu. Des métiers de "petites mains" (secrétariat, documentaliste, distributeur de courrier, etc.) ont été supprimés. En revanche, dans les services, le nombre d'employés n'a pas été réduit. Parfois, au contraire, il a augmenté.
Car désormais, les fonctions transverses se sont multipliées. Simplification des procédures, mise à jour des normes, traitement des problèmes de non-qualité, constitution d'un outil de reporting et autres bakayoke... Autant de projets qui durent des mois et qui feront très bien sur un rapport annuel. Au lieu de travailler sur leur métier, les cadres enchainent les réunions de suivi, les Excel, etc.

Le problème, c'est que parfois, il y a un vrai projet ! En général, on commence par le donner aux employés. Mais faute de temps - et de récompense en cas de succès -, ils ne s'en occupent pas. Alors il faut embaucher un presta dédié. Les entreprises ont du budget, pour les prestataires. Alors elles s'offrent des vieux hommes blancs, facturés à prix d'or par les cabinets. Dans les grands groupes, notre quadra, voire quinqua, se retrouve avec une équipe "diversifiée" et ayant l'âge de ses enfants. Pour eux, les "boomers" sont le mal incarné et les rapports sont franchement hostiles. En théorie, notre prestataire devrait disposer du support des employés. En pratique, ils l'envoient promener.
Les mois passent et le projet progresse. La hiérarchie commence à en parler. Alors, tels des chiens de prairies, les employés passent la tête. Ce n'est pas exactement une ITF. L'ITF, c'est l'apanage des managers et ils n'arrivent que lorsque le projet est achevé à 90%. Les chiens de prairie arrivent plus tôt. Rappelons qu'ils haïssent le presta et ils ne vont surtout pas lui demander un briefing ! Ils préfèrent s'inviter dans les réunions. Réunions qu'ils interrompent avec des questions idiotes. Et bien sûr, ils font attention à ne pas se mettre en action de rien ! L'objectif, c'est uniquement d'avoir son nom sur le compte-rendu. Ensuite, comme des chiens de prairies, ils retournent à leur tanière.

mercredi 16 juillet 2025

Le manager, ce travailleur pauvre


Au boulot, il est possible de payer par carte, à la machine à café. L'autre jour, quelqu'un avait oublié sa carte Visa Electron dans la machine. Je l'ai prise et je me suis approché d'un groupe de jeunes : "C'est à quelqu'un d'entre vous ?" Et à ma grande surprise, c'est une manager qui s'est approchée. Une manager avec une carte de retrait, avec autorisation systématique et découvert impossible ! Cette personne doit avoir une situation financière vraiment passable...

Il faut dire que financièrement, les Français sont dans une impasse. Les salaires stagnent et les dépenses augmentent en permanence, à commencer par les impôts.
Supposons que vous soyez cadre "senior". Vous avez un salaire annuel de 48 000€, ce qui est plutôt confortable... Du moins, en théorie. L'URSSAF permet de calculer les Pour que vous gagniez 48 000€, votre employeur dépense 65 215€. Votre salaire net, lui, est de 37 677€. Après impôts, il vous reste 33 787€, soit 2 815€ mensuels. De quoi payer un loyer de 930€.
Maintenant, vous êtes promu manager. La grille de salaire de l'entreprise est très rigide et vous voilà désormais à 50 000€. Pour vous octroyer une augmentation de 2 000€, votre employeur doit débourser près de 5000€, avec un total employeur de 70 920€ annuel. Votre net imposable, lui, il ne gagne que 1 500€, à 39 281€. Et votre salaire après impôt atteint 35 227€, soit 2 935€ mensuel. Pas de quoi déménager. Votre charge de travail a quasiment doublé, tout cela pour 100€ en plus par mois. 100€ qui seront sans doute absorbés l'année prochaine avec la révision de votre loyer.

Au-delà d'un certain niveau, lors des entretiens, vous évoquez à peine le salaire. Le treizième mois, les primes pour résultat, c'est fini. Après tout, cela financera surtout le Trésor Publique. La vraie question, c'est la voiture de fonction, la carte Total, le niveau des notes de frais, etc. D'ailleurs, le Trésor Publique les considère désormais comme des avantages en nature. L'inconvénient N°1, c'est qu'ils sont décorrélés de vos résultats. Que vous soyez un bon ou un mauvais manager, vous toucherez la même chose. D'où une tendance à l'aquoibonisme du kolkhoze : à rétribution égale, pourquoi se décarcasser ? L'inconvénient N°2, c'est que le salaire avec avantages en nature pris en compte par le Trésor Publique, c'est un salaire virtuel. Ce qui compte, pour votre banquier, c'est le chiffre en bas, à droite, de votre bulletin de salaire. Si vous n'aviez pas déjà contracté un emprunt immobilier, vous êtes marron.
En bas de l'échelle, on réclame aussi des avantages en nature : tickets restaurants, chèques vacances, pass culture... A défaut de gagner plus, on veut dépenser moins. Les crispations récentes sur leur utilisation démontre bien une préoccupation des Français. On en est au point où même la classe moyenne compte chaque euro.
En ce moment, vous avez le meme "c'est Nicolas qui paye". Il vise notamment les retraités, supposément adeptes de croisières au soleil. Beaucoup de retraités se défendent en disant qu'ils aident financièrement leurs enfants. En comptant vingt-cinq ou trente ans par génération, un retraité de soixante-dix ans a donc des enfants de quarante, voire quarante-cinq ans. On n'est plus sur des jeunes actifs qui ont besoin d'un coup de pouce ! On vit dans une France où des personnes ayant déjà une carrière professionnelle ont besoin d'aller quémander de l'argent de poche à leurs parents.

Lorsque j'ai démarré ce blog, les gens ne croyaient plus à l'ascension sociale par le salariat. Les plus jeunes rêvaient de l'argent facile de la télé-réalité. Puis il y a le temps des paris sportifs, des influenceurs. Récemment, j'étais dans une ville où le seul restaurant ouvert, c'était un casino. Je m'attendais à voir des mamies squatter les machines à sous. Mais il n'y avait quasiment que des jeunes de vingt, vingt-cinq ans.
Désormais, la question est de savoir si le salariat est financièrement viable pour un junior. A quoi bon travailler, si c'est pour avoir des fins de mois difficiles, même à quarante ans, même en temps que manager ? Telle cette femme avec sa carte Visa Electron.

mardi 15 juillet 2025

Mon voisin du jour


En ce moment, je suis en prestation dans une entreprise ayant de nombreux sites. Le plateau presta sert également d'espace de coworking pour les employés venus d'autres sites.

L'autre jour, j'avais ainsi un voisin pour la journée. D'ordinaire donc, il travaille sur un autre site. C'est un quinquagénaire qui travaille en mi-temps thérapeutique.
Son histoire, il la racontait à qui voulait l'entendre. Il y a quelques années, il était manager. Sa femme a été atteinte d'un cancer foudroyant. Il a du poser des congés pour l'accompagner dans ses derniers moments. Puis la femme de sa vie, la mère de ses enfants, s'est éteinte. Lorsqu'il a repris le travail, ses collègues n'ont exprimé aucune empathie. Quelqu'un - qui ne connaissait pas le motif de son congé - lui a demandé : "C'était bien, les vacances ?"
Ca l'a dévasté. Il est tombé en dépression et il effectua un long arrêt-maladie. Un an plus tard, il a repris une nouvelle fois le travail. Il a été muté et il n'est plus manager. Ses anciens collègues l'ont oublié.

En fin d'après-midi, son N+1 est arrivé. Particularité : ce N+1 est basé sur mon site. Le N+1 aurait l'âge d'être le fils de mon voisin du jour. Comme ils se voient rarement, mon voisin a raconté de nouveau son parcours. Le N+1 était gêné. Ils n'étaient pas assez proche pour qu'il veuille connaître sa vie intime. Plus prosaïquement, le N+1 voyait bien que l'autre était entre deux arrêts-maladie. Tôt ou tard, il va décrocher de nouveau et le N+1 devra confier sa charge de travail aux autres. Au moins, le N+1 n'accuse pas l'autre de simuler.
Ce voisin avait aussi un côté Yves. Sa carrière professionnelle est derrière lui, mais il doit attendre encore une bonne dizaine d'années avant la retraite. Nonobstant une énième réforme sur l'âge de départ. Ses anciens camarades l'ont abandonné. Il n'est plus qu'un boulet, qu'on se refile de service en service.

Le lendemain, j'ai vu une de ces séries US, à la TV. Le héros demandait à son chef d'être le témoin de son mariage. Tout le service était présent à la cérémonie. Le chef en question, très paternel, donnait au passage des conseils au héros.
Quel contraste avec cet éphémère voisin, complètement isolé et dont tout le monde se fiche ! Quel contraste aussi entre ce chef, patriarche charismatique et ce N+1 couard, qui a été formé à coups de vidéos !

lundi 30 juin 2025

L'enfer des bureaux modernes


Il y a quelques années, j'avais évoqué l'enfer des plateaux de travail "start-up". Hélas, depuis, ça s'est généralisé.

Tous les jours, on vous parle du changement climatique. Pour lutter contre lui, il faut être "sobre". En entreprise, cela signifie consommer moins d'électricité, d'eau, émettre moins de déchets, etc. A priori, jusqu'ici, tout le monde est pour. Dans les secteurs primaire et secondaire, cela signifie revoir les méthodes de production. Trouver des processus innovants pour utiliser moins, jeter moins. Mais en France, les deux tiers des emplois sont dans le tertiaire.

Or, les directives ne disent pas : "Les industries les plus consommatrices doivent faire des efforts." Mais : "TOUTES les entreprises doivent faire des efforts." Donc, au lieu d'optimiser les méthodes de production, on rogne sur la qualité de vie au bureau.

Premier poste de dépense : le chauffage. L'isolation ne suffit pas. Désormais, l'hiver, le thermostat est bloqué à 19° et l'été, il ne descend pas en dessous de 26°. Les anglo-saxons s'étonnent toujours de cette détestation très française de la climatisation. En attendant, l'hiver, vous grelottez. Car c'est 19° MAXIMUM. Et pendant la nuit, le chauffage est coupé. Le matin, vous pénétrez donc dans un frigo. L'été, c'est l'inverse. Avec une bonne odeur de transpiration dans les open-space ! 
L'eau, cela concerne surtout les toilettes. Avec les chasse d'eau économiques, vous gros caca refuse d'être évacué. Et ensuite, les gouttelettes du lavabo optimisé mettent du temps à laver vos mains. Pour l'hygiène, ce n'est pas top... Bien sûr, la plomberie écologique est rapidement bouchée et ça déborde de partout.
Les photocopieuses et les imprimantes se sont raréfiées. Souvent, vous avez des quotas d'impressions. Tant pis pour les métiers techniques. Dans les BE, on entend : "Je dois imprimer un truc, mais j'ai plus de quota. Et toi ? - Moi, il me reste à peine deux pages, alors que je suis sur quelque chose..." Alors au final, il faut utiliser le login du chef de service ou du presta parti le mois dernier (en attendant que l'informatique n'écrase son compte.) Evidemment, l'entreprise ne donne plus de carnets, de cahiers ou de stylo.
Et maintenant, cela touche les déchets. Terminé, les corbeilles dans chaque bureau ! On est passé aux poubelles de tri sélectif. Mais même elles, elles se sont raréfiées. Car s'il y a moins de poubelle, les gens y réfléchiront à deux fois, avant de jeter, non ? Au contraire, c'est le règne du chacun pour soi. Les habitués de Deliveroo n'ont aucun scrupule à remplir l'une poubelle de l'étage. Ils déposent leurs gros sacs comme cela, sans même écraser les emballages à l'intérieur. En fin de journée, il y a une montagne de détritus sur la poubelle, voire autour de la poubelle.
Et attention à l'électricité ! Certaines entreprises vous interdisent de recharger votre portable personnel.

Vous avez donc l'impression de travailler dans une ruine, le charme de l'ancien en moins. Pas le genre d'endroit où vous vous épanouissez. Et après, les DRH s'étonnent du turnover...